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du ciel : étoiles et nébuleuses. Le spectroscope s’adaptant au foyer des lunettes et des télescopes, de façon que l’on puisse concentrer sur sa fente, l’image fournie par l’objectif des astres que l’on veut analyser, on est ainsi parvenu à reconnaître dans le soleil la présence du fer, du nickel, du zinc, du cuivre, du carbone, du calcium, de l’hydrogène, etc… Dans bon nombre d’étoiles, la grande majorité, nous avons pu retrouver des éléments analogues aux substances solaires et terrestres. C’est toujours grâce au spectroscope que l’on a pu classer les soleils de l’infini en quatre types fondamentaux, selon la diversité plus ou moins grande de leur constitution intime, résultant du stade de leur évolution. D’autres applications permettent, par des variations de l’emplacement des raies, de déterminer la vitesse dans l’espace de l’astre observé, cela en dehors de notre perception directe. Aujourd’hui, on remplace l’observation directe du spectre par sa photographie : l’image du spectre est reçu sur une plaque sensible et ainsi, le spectroscope devient un spectrographe.

L’analyse spectrale, dont l’initiateur fut Frauenhofer, puis, plus tard, Kirchoff et Bunsen, a créé l’Astrophysique, branche nouvelle et merveilleuse de l’astronomie, qui, au cours des dernières années, a conduit les savants aux découvertes les plus troublantes, les plus curieuses relativement à la nature des étoiles et des nébuleuses en particulier. Cet instrument prodigieux d’investigation justifie le lyrisme de l’illustre Janssen quand il s’écriait « Étoile ! envoie-moi un de tes rayons et je te dirai de quoi tu es faite ! » — Charles Alexandre.


SPIRITISME n. m. L’homme se résigne mal à la mort. Il se consolerait aisément de ne rien comprendre aux problèmes généraux de l’univers, mais l’idée de sa disparition complète l’épouvante. Il ne faut pas chercher ailleurs la raison du succès de toutes les religions et en particulier du Spiritisme. Le spiritisme s’est, à certains égards, mis en harmonie avec les idées modernes. On resterait sceptique à notre époque devant un homme qui prétendrait avoir bénéficié de révélations spéciales. Moïse, s’il revenait raconter aujourd’hui que Dieu en personne lui a donné audience sur une montagne, aurait bien des chances de ne pas être cru ; les montagnes, mystérieuses autrefois parce que difficilement accessibles, ne le sont plus aujourd’hui. Notre temps veut des faits, des expériences ; c’est ce qu’apporte le spiritisme, ou du moins, ce qu’il prétend apporter. Il a ses laboratoires dans les instituts métapsychiques, ses sujets, ses médiums, ses savants, des savants officiels même, qui, avec beaucoup de sérieux, s’adonnent à son étude.

Le spiritisme a pris naissance en Amérique vers 1848. Dans un village perdu loin de toute grande agglomération, des jeunes filles prétendirent entendre des voix et des coups frappés par un être invisible. Plus tard il fut reconnu qu’il n’y avait que supercherie dans ces prétendus phénomènes ; mais, qu’à cela ne tienne, le spiritisme fit quand même son chemin.

La religion spirite a été développée par Allan Kardec dans ses deux ouvrages célèbres : le Livre des Médiums et le Livre des Esprits. L’homme comporte trois parties : le corps périssable, le périsprit ou corps astral, fait de matière plus sublimée et l’esprit ou l’âme. Après la mort, l’esprit et le périsprit sont libérés ; ils vivent des vies successives, toujours de plus en plus parfaites.

Les hommes, en se soumettant à certaines conditions, peuvent communiquer avec les esprits ; ces communications sont de diverses espèces : la typtologie permet de converser avec les esprits par le moyen de la table. La table se soulève et retombe, frappant de son pied des coups dont le nombre correspond aux lettres de l’alphabet ; un coup pour A, deux coups pour B, etc… Ces communications sont très difficiles. Des gens désœuvrés se réunissent, le soir de préférence, pour se livrer à ce

petit jeu. Très souvent, sentant qu’il s’agit d’une lettre avancée dans l’alphabet et craignant un grand nombre de coups, il y a doute ; il faut recommencer et on n’aboutit à rien. Aussi, beaucoup de spirites préfèrent employer la planchette à médium. C’est une petite planche de forme triangulaire et pourvue de trois roulettes. Sur une table on place une bande de papier où sont figurées les lettres de l’alphabet. Le médium s’assoit devant la table, pose la main sur la planchette ; si l’esprit évoqué est présent, la planchette roule vers la lettre qu’il indique. Il n’y a plus qu’à former les mots et les phrases. Plus faciles encore sont les communications lorsqu’on dispose d’un médium écrivain. Il n’a qu’à prendre un crayon, du papier et à attendre l’inspiration.

D’autres médiums sont parlants, L’esprit évoqué prend, pour un temps, possession de leur corps et s’en sert pour communiquer avec les vivants. Le consultant qui a perdu un être cher et qui espère communiquer avec lui va trouver le médium ; celui-ci entre en transe, sa voix change, prend le timbre de la voix du mort et le consultant est persuadé que c’est le mort qui parle. Il ne dit, et pour cause, que des choses très vagues et il ne manque pas de consoler son parent, de lui dire qu’il est heureux dans l’au-delà. Le client s’en va un peu consolé, je dis un peu, car, malgré sa naïveté, le consultant ne peut pas ne pas voir qu’il n’a eu affaire qu’au médium et nullement au mort qu’il regrette.

Il est enfin des médiums à matérialisations ; ce sont les plus recherchés. Certains font apparaître des formes ectoplasmiques. De leur bouche s’échappe une matière ténue et lumineuse qui, d’abord en forme de sphères, prend peu à peu l’aspect d’un corps humain. D’autres font apparaître des fantômes vêtus de voiles blancs, d’autres des membres humains qui consentent même à se laisser prendre un moulage, pour bien prouver leur réalité. Ces phénomènes ne se produisent jamais simplement. Il faut au médium tout un appareillage qui évoque le théâtre, qu’il est en réalité. La salle doit être obscure. Le médium est en outre caché derrière un rideau noir. Le fantôme surgit de derrière le rideau, il est interdit d’en approcher, de le toucher et aussi de faire la lumière pour se rendre compte de ce qu’on voit au juste. Les séances de matérialisations sont toujours soigneusement préparées. Les assistants sont mis en état de réceptivité par des chants, de la musique, etc… Lorsque l’Esprit est bien disposé, il nous laisse un souvenir apporté de l’au-delà. Ce sont des objets tout à fait terrestres : fleurs artificielles, morceaux de papier coloré ; on les trouve facilement dans le commerce.

Nous n’avons guère jusqu’ici parlé que des médiums. C’est parce que le médium est indispensable ; tous les spirites vous le diront ; sans médium, pas de phénomènes. Ces médiums sont des personnes ayant reçu des dons spéciaux, leur permettant de communiquer avec l’au-delà. Leur système nerveux ultra-sensible fait d’eux des malades, une maladie enviable à bien des égards, car, pour peu que les circonstances soient favorables, elle fera leur fortune. Le médium sera couvert d’or, reçu par les rois ; il pourra même, parti de l’isba d’un moujik, gouverner l’État, tel Raspoutine.

Qu’y a-t-il de vrai dans les affirmations des spirites ?

Rien ! Et c’est bien à désespérer de l’humanité de la voir aussi stupide, en dépit de la T. S. F., de l’automobile et de l’aviation.

Tous les médiums ont été pris en flagrant délit de supercherie. Lié de corde et surveillé par une commission de professeurs, le médium parvient à libérer un membre et s’en sert pour déplacer un objet qui devrait se déplacer tout seul. La carrière d’un médium a trois phases : l’ascension, l’apogée et la catastrophe. Après un temps plus ou moins long pendant lequel le médium connaît tous les triomphes, on découvre la supercherie et il tombe à plat.

Mais, si l’individu disparaît, l’espèce subsiste. Un