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personnellement : les noms des criminels restent gravés dans la mémoire des gens, mais ceux des savants, des bienfaiteurs de l’humanité s’effacent aussi vite qu’ils ont été enregistrés, si tant est qu’ils le furent. Aussi, peut-on dire, sans crainte d’être taxé d’exagération, que la calomnie est un véritable crime.

Elle est la cause de grands et terribles drames, et c’est assurément la calamité qui a, à son compte, le plus grand nombre de victimes.

Il faut travailler de toutes nos énergies à enlever de nos mœurs cette dégradation de l’être. Pour cela, il nous faut habituer les gens à la franchise, il nous faut, toutes les fois que nous le pourrons, arrêter net la calomnie à ses débuts. Quand nous entendons quelqu’un lancer une accusation contre un autre, forçons l’accusateur à confirmer ses dires devant celui qu’il veut accabler ; demandons, exigeons des preuves formelles, sinon, n’hésitons pas à le flétrir et à s’écarter de lui comme on s’écarte d’un pestiféré, comme on se sépare d’un mouchard : car le calomniateur dépasse quelquefois le mouchard en vilenie. N’accueillons pas les racontars, ne ramassons pas les accusations à la légère. Disons-nous bien que celui qui voyant se perpétrer un crime ne fait rien pour l’empêcher devient aussi criminel que l’auteur du crime. Et mettons-nous bien cette pensée dans la tête : que le calomniateur est l’être le plus vil, le plus lâche, le plus ignoble, le plus abject et le plus criminel qui puisse être. Et pour arrêter à jamais le règne infâme de la calomnie, faisons de la franchise un devoir dans nos relations humaines, et nous aurons bien travaillé pour l’avènement d’une société dans laquelle la vérité sera le principal pilier de la fraternité entre tous les hommes.

Louis Loréal.


CALOTIN. n. m. Homme appartenant à la catégorie des bigots, cagots (voir ces mots).


CALVAIRE. n. m. Le Calvaire (avec une majuscule) du Golgotha est une montagne, près de Jérusalem, où, d’après la légende, fut crucifié Jésus-Christ. (Sur son emplacement s’élève aujourd’hui la basilique du Saint-Sépulcre.) Par dérivation et au sens propre, le mot calvaire (sans majuscule) sert à désigner une petite élévation sur laquelle on a établi une représentation figurée de la Passion, ou une simple croix. C’est au Moyen-Age que l’on conçut l’idée de figurer dans le voisinage des églises paroissiales, les principales scènes de la Passion. Ces petites mises en scène sont une excellente occasion de processions et de quêtes pour l’Église. Au sens figuré, et par allusion aux souffrances endurées par Jésus-Christ gravissant la montagne du Calvaire, on appelle calvaire une cruelle douleur morale extrêmement pénible à supporter. Exemple : une heure sonnera où les peuples se lasseront de gravir leur calvaire sans murmurer.


CALVINISME. s. m. Doctrine de Calvin et de ses sectateurs ; réforme religieuse telle que l’entendait Calvin. Les dogmes essentiels du Calvinisme, peuvent se réduire à six principaux, savoir :

1° Dans le sacrement de l’eucharistie, Jésus-Christ n’est pas réellement dans l’hostie ; nous ne le recevons que par la foi ;

2° La prédestination et la réprobation sont absolues ; l’une et l’autre dépendent de la pure volonté de Dieu, sans égard au mérite ou au démérite des hommes ;

3° Dieu donne aux prédestinés la foi et la justice, et ne leur impute point leurs péchés ;

4° La conséquence du péché originel est l’affaiblissement de la volonté de l’homme, au point qu’elle est incapable de faire aucune bonne œuvre méritoire de salut et même aucune action qui ne soit vicieuse ;

5° Le libre arbitre consiste à être exempt de co-action et non de nécessité ;

6° Les hommes sont justifiés par la foi seule ; en conséquence les bonnes œuvres ne contribuent en rien au salut ; les sacrements n’ont d’autre efficacité que d’exciter la foi.

Calvin n’admettait que deux sacrements : le baptême et la Cêne ; il rejetait absolument le culte extérieur et la discipline de l’Église catholique.

Né du libre-examen, Calvin nia la liberté. Il affirma la prédominance de la raison individuelle, sur les autres raisons. Mais le Calvinisme après la mort de Calvin, ne tarda pas à revenir à son point de départ et à apporter le secours de la raison, à la foi. La religion en souffrit, car naquirent des protestants : les libres-penseurs, dont l’analyse ne s’était pas arrêtée au culte catholique, mais s’attaqua à la base même des religions, à Dieu.

Calvin, né à Noyon, mort à Genève (1509-1564), étudia la philosophie, la théologie, puis le droit, passa au protestantisme en 1534, publia en latin (1536) puis en français (1541), son livre de l’Institution chrétienne, d’une langue ample et forte, et s’installa à Genève, dont il réforma les idées et les mœurs de manière à en faire la citadelle du protestantisme. Ses disciples reçurent, en France, le nom de Huguenots. Le calvinisme est répandu surtout en Suisse, en Hollande, en Hongrie et en Écosse. En Angleterre, il a produit le puritanisme et la plupart des sectes non conformistes. Quoique moins hypocrite que le catholicisme, le protestantisme n’en est pas moins néfaste comme toutes les religions.


CAMARADE. Mot qui s’est substitué, chez les cabotins de la politique, au mot « citoyen », qui était usé et ne rendait plus. Tout candidat à la députation se croit obligé de commencer ses discours par l’expression « camarades », c’est plus familier, plus démocratique. « Citoyens », c’était encore trop bourgeois. Il a donc fallu inventer un terme nouveau, ou plutôt utiliser un terme ancien pour flatter le peuple et l’endormir. Camarades a été ce mot là. Il a fait son entrée dans la politique, est devenu à la mode et il n’est guère aujourd’hui de groupements, de réunions, de « meetings » où il ne soit employé par les dirigeants d’un parti. Sommes-nous plus heureux, moins « légalisés », moins accablés d’impôts, moins prisonniers de l’autorité depuis qu’un tel mot a été introduit dans le jargon politicailleur ? Au contraire, il n’y a jamais eu moins de « camaraderie » dans les groupements où les premier venus emploient ce mot sans y croire, le galvaudant, l’abaissant au niveau de leur mentalité d’arrivistes.

Pseudo-camarades. Quand on prononce le mot « camarades », on est porté naturellement à croire qu’il traduit une affinité d’esprit, des liens de sympathie, d’amitié, d’entraide, d’estime, d’affection, entre esprits pensant la même chose et agissant dans le même but. L’expérience nous démontre malheureusement qu’il n’en est pas toujours ainsi, et que ce mot ne correspond nullement à son sens véritable. On est tout étonné de rencontrer parmi les « camarades », des êtres indifférents, hostiles, et même dangereux. C’est un mot dont on a beaucoup abusé et dont on abuse encore. Il faudrait mettre un terme à cet abus. Ce mot ne devrait pas être employé à tout propos. Parce qu’ils se sont serré la main en se disant : « Camarades », des gens croient avoir prouvé leur attachement à la cause et mis en pratique leurs idées. Il n’en est rien. Nos pires ennemis se recrutent souvent parmi nos camarades. Ceux-ci, connaissant nos secrets, car nous nous confions à eux alors qu’ils oublient de se confier à nous, sont bien placés pour nous trahir. On se demande d’où