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ACT

tant de la classe adverse ou sur un de ses camarades inconscient de son devoir de classe, fait aussi une action directe.

Toutefois, un tel acte ne doit avoir lieu que s’il est réellement un facteur de succès, de réussite de l’action engagée. Dans le cas contraire, si l’acte est inconsidéré, une simple manifestation de colère, il risque de desservir — et souvent considérablement — le mouvement en cours.

Avant d’employer ce moyen d’action — qui peut s’imposer — l’individu doit se rendre compte, par avance, de la portée de son acte et de ses conséquences probables. Il ne doit l’accomplir que s’il l’estime réellement utile au succès de la cause qu’il défend. Se laisser aller à l’accomplissement irraisonné d’un acte de violence ou de sabotage c’est faire preuve de faiblesse, d’inéducation, d’incompréhension. C’est prêter le flanc à l’adversaire et souvent justifier la violence adverse, même si on est provoqué, ce qui arrive d’une façon courante.

4o  Un syndicat peut, lui aussi, décider d’employer la violence ou le sabotage. Toutefois, il ne saurait en imposer l’exécution à ceux de ses membres qui n’accepteraient pas ces moyens de lutte ou ne désireraient pas les utiliser eux-mêmes.

Dans ce cas, seule la conscience de chacun décide pour l’accomplissement des actes reconnus nécessaires. Il est bon que les participants ou exécutants soient seuls au courant des projets, des tentatives à exécuter et arrêtent seuls leurs moyens d’action. Le secret est de rigueur. Seuls, ceux qui ont décidé d’agir ainsi dans le bien commun, sont juges de leurs actes. Les autres, par contre, sont juges du résultat. Ils ne doivent pas hésiter à en condamner l’emploi nouveau où le résultat est défavorable à la cause commune. Pas plus qu’une collectivité n’a le droit de s’opposer aux actes nécessaires, des individualités ne doivent accomplir des actions qui vont à l’encontre du résultat cherché. C’est affaire de conscience et de circonstances. Ce qui était mauvais hier peut être bon demain et vice-versa.

5o  L’homme qui abat un tyran, un oppresseur redoutable, par quelque moyen que ce soit, accomplit aussi un acte d’action directe, bien qu’il ne s’attaque pas au régime lui-même et qu’il ne mette que rarement celui-ci en péril. Il agit directement contre un adversaire social qui se révèle particulièrement malfaisant.

6o  Un groupement peut être appelé à agir dans les mêmes conditions. Dans ce cas, il est nécessaire que les participants acceptent cette façon de mener la lutte, comme ils le feraient s’il s’agissait d’un acte de sabotage, de destruction ou de violence collective. Les mêmes précautions sont à prendre et l’action ne peut être engagée ou continuée que dans les conditions exposées au § 4. Un tel acte ou une telle série d’actes peut parfois s’imposer et devenir un facteur important et même décisif de succès en période révolutionnaire.

Comme on le voit, l’action directe peut se présenter sous des aspects très différents, suivant les circonstances et les buts poursuivis.

Si on tient compte des exemples qui précèdent, on peut dire qu’elle revêt les caractères suivants : discussion individuelle ou collective de classe, grève avec ses multiples aspects, sabotage et sévices contre le patronat ou les ouvriers inconscients, attentats contre un oppresseur ou un groupe de représentants du pouvoir.

De même qu’il peut y avoir discussion de classe sans grève, il peut y avoir grève sans sabotage, sévices ou chasse aux renards. Une seule de ces manifestations caractérise l’action directe. Il suffit qu’elle s’exerce individuellement ou collectivement, de classe à classe, sans recourir à des forces étrangères au conflit lui-même.

En période révolutionnaire, l’action directe prend immédiatement le caractère de grève générale

insurrectionnelle. Elle a pour but de permettre à la classe ouvrière de s’emparer des moyens de production et

d’échange qui assurent, en tout temps, la continuité de la vie sociale. Elle supprime le concours partiel ou total du prolétariat encaserné. L’action directe devient, en cette occasion, nécessairement violente, puisqu’elle s’exerce contre un adversaire qui se défend par la force.

Elle est le premier acte révolutionnaire d’un prolétariat qui vise à remplacer le pouvoir politique par l’organisation sociale, après avoir détruit la propriété individuelle et instauré la propriété collective.

Elle s’oppose à l’insurrection, arme des partis politiques qui tous, sans exception, n’ont qu’un désir : prendre le pouvoir et le garder. L’action directe est la seule et véritable arme sociale du prolétariat. Nulle autre ne peut, quelque emploi qu’on en fasse, lui permettre de se libérer de tous les jougs, de tous les pouvoirs, de toutes les dictatures — y compris la plus absurde d’entre elles : celle du prolétariat.

On retrouvera la définition des termes : discussion de classe, grève, lock-out, sabotage, attentat ou sévices, chasse aux renards, à leur ordre alphabétique.

En somme, il y a une très notable différence entre la définition bourgeoise de l’action directe et la signification réelle que nous lui donnons.

Alors que nos adversaires — et cela se conçoit — ont surtout voulu montrer l’action directe comme un acte ou une série d’actes désordonnés, brutaux, violents, sans raisons ni motifs, destructeurs pour le plaisir ou la satisfaction de ceux qui les accomplissent, nous affirmons que l’action directe est ordonnée, méthodique, réfléchie, violente quand il le faut seulement, dirigée vers des buts concrets, nobles et largement humains.

Pierre Besnard.


ACTION DIRECTE. — Il n’y a pas que l’action par laquelle le Syndicalisme et certaines écoles révolutionnaires pensent faire aboutir leurs revendications qu’on puisse qualifier d’action directe. Il y a encore — et parallèlement à cette forme collective de l’Action directe — la forme individuelle de celle-ci. Celle-ci a pour terrain l’homme lui-même. Elle consiste dans l’évolution intérieure de l’individu, dans la violence qu’il exerce sur lui-même, dans son effort pour se surmonter, s’embellir et devenir meilleur, dans la guerre qu’il livre à ses passions, dans la victoire qu’il remporte chaque jour sur la laideur. Les résultats de cette Action directe sont positifs. L’art, la pensée, les livres aident l’individu à se découvrir ; ils le révèlent à lui-même. Ils agissent directement sur sa conscience, pour la réformer, l’augmenter, la fortifier.

Gérard de Lacaze-Duthiers.


ADAPTATION n. f. Action d’appliquer, d’approprier une chose à une autre. — En biologie, on entend par adaptation la modification qui rend un organe plus apte à sa fonction. Un organe particulier est adapté lorsque, parmi les diverses manières d’être possibles, il réalise le maximum d’effets ; un être est adapté quand ses organes le sont. L’adaptation domine toutes les théories évolutionnistes.

Darwin a bien montré que, parmi les variations, seules, celles qui peuvent s’adapter sont conservées. Dans les classifications naturelles, il faut éliminer toutes les ressemblances adaptatives. Ainsi, chez les vertébrés qui volent, et, par suite, se ressemblent par adaptation à cette fonction, les uns seront rangés parmi les mammifères, d’autres parmi les reptiles, le plus grand nombre parmi les oiseaux.

Le mot adaptation est également employé au sens figuré. Exemple : un individu peut s’adapter à un milieu autre que le sien. Les nationalistes prétendent