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Aussi, sont-ils persuadés qu’ils manqueraient aux plus élémentaires devoirs d’équité, s’ils n’attribuaient pas la place qui leur revient à ceux qui : philosophes, savants, écrivains, artistes, éducateurs, hommes de révolte, ont contribué — si peu que ce soit, sans être spécifiquement anarchistes et, parfois même, à leur insu — au déblaiement de la route, au renversement des obstacles, à la mine des préjugés, à la transformation des méthodes, au perfectionnement des formes, en un mot au labeur séculaire d’une humanité s’acheminant, douloureusement et lentement, vers des sommets toujours plus élevés, des horizons toujours plus vastes et une beauté de plus en plus rayonnante.

Les anarchistes savent que, si leur Idéal n’est plus considéré, de nos jours, comme une hallucination de cerveaux en délire et un enfantement d’imaginations maladives ayant soif d’absolu, ce résultat n’est pas le salaire de leurs seuls efforts. Ils ont conscience qu’ils sont les bénéficiaires du travail opiniâtre et le plus souvent ingrat, des grands précurseurs. Ils conçoivent que, si l’heure de la révolte est relativement proche, il est juste d’en faire remonter le mérite — en partie du moins — aux illustres et héroïques semeurs qui ont jeté, avant eux, le bon grain.

Ils se rendent compte que, pour être féconde et positivement libératrice, il est indispensable que la Révolution, quand elle éclatera, soit l’aboutissant et comme le point terminus d’une longue évolution prédisposant les esprits à accueillir avec faveur, la naissance du Monde nouveau et à en favoriser le développement et la stabilité, en s’adaptant aux nouvelles formes de vie.

Pour ces motifs, L’Encyclopédie Anarchiste consacrera sa quatrième partie à l’exposé de la Vie et de l’Œuvre de cette légion d’hommes grands par le cœur, l’esprit et la volonté, qui ont collaboré, sans qu’ils se réclament de l’Anarchisme, à l’élaboration d’une mentalité nouvelle, à l’édification d’une philosophie et d’une morale plus humaines, à la gestation d’idées, de sentiments et de modes de vie supérieurs, à la formation de générations traversées par le grand souffle émancipateur.


CINQUIÈME PARTIE. — Catalogue des livres, brochures, journaux, revues et publications de toutes sortes, de propagande anarchiste ou anarchisante.(Ordre par pays et par langues.)

Dans les quatre premières parties de cette Encyclopédie, il sera fréquemment fait mention des ouvrages dans lesquels se trouvent exposées les théories anarchistes. Ce catalogue présentera ceux-ci, langue par langue, en conformité d’un classement rationnel. Le lecteur pourra, ainsi, se reporter facilement aux ouvrages cités, les consulter dans leur entier et y puiser la documentation dont il aura besoin.

On sera étonné de l’incroyable richesse de la littérature anarchiste et anarchisante et de l’abondance des œuvres de premier ordre qu’y peuvent rencontrer les personnes studieuses, désireuses de se renseigner sur toutes les doctrines sociales.


PRÉCIEUSES INDICATIONS

Tel est le plan général de cette « Encyclopédie Anarchiste ».

On peut estimer qu’il est vaste ; en réalité, il sera plus vaste encore que, à première vue, on serait disposé à le croire.

Je m’explique :

1o D’une part, toutes les tendances, toutes les thèses qui, dans leur ensemble, constituent l’Anarchisme, y seront impartialement exposés. Éliminer, de propos délibéré, une seule de ces thèses, c’eût été faire œuvre de partisans et non d’éducateurs consciencieux ; c’eût été enlever à ce mouvement, une partie de son ampleur, de sa majesté ; c’eût été mutiler volontairement l’Anarchisme, en le privant d’un de ses traits distinctifs.

Sous peine d’être incomplète et de trahir son but, cette Encyclopédie doit être le reflet de toutes les conceptions s’inspirant de l’Anarchisme ; elle doit abandonner à chacun de ses lecteurs, le soin de choisir entre les diverses tendances et de se rallier librement à celle qui, à ses yeux, se rapproche le plus de l’exactitude, et cadre le mieux avec son tempérament.

Ennemi de toute contrainte, l’Anarchiste n’impose jamais : il expose, il propose, il attire l’attention, il provoque la réflexion, il suscite la méditation. Quand il convie à se prononcer, ceux qui l’écoutent ou le lisent, il ne se croit autorisé à le faire, qu’après avoir placé ses lecteurs ou ses auditeurs en face des aspects multiples et parfois opposés de la thèse soumise à l’examen et à la controverse. Il s’inscrirait en faux contre l’essence même de l’Anarchisme si, pour faire triompher son propre point de vue, il passait son silence les autres ou, de sa propre autorité, en étouffait l’expression.