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pas son premier essai contre les jésuites. Avant d’avoir affaire à eux sur le terrain de la morale et de la théologie, il les avait rencontrés sur son chemin, au milieu de ses travaux scientifiques. Un certain Père Noël, peu fort sur la physique et sur le style, avait attaqué, dans le ton d’une plaisanterie assez grossière, les expériences de Pascal sur le vide. Le jeune savant répondit, et la discussion revêtit sous sa plume un langage dont l’élévation et l’ironie font pressentir les Provinciales[1].

On eût dit que la mauvaise étoile des jésuites les poussait à provoquer ce redoutable adversaire. Un autre Père de la même compagnie, directeur du collège de Mont-Ferrand, s’avisa de faire soutenir par ses élèves une thèse dans laquelle on prétendait que Pascal s’était attribué, contre toute justice, les expériences de Toricelli sur la pesanteur de l’air. Cette calomnie lui valut la publication d’une lettre, où le bonhomme, comme l’appelle Pascal, fut couvert de confusion.

Dans ces pages d’un jeune homme de vingt-quatre ans se révèlent déjà, sous l’aridité nécessaire d’une discussion scientifique, les qualités du penseur profond et de l’écrivain exquis : la force et la clarté du raisonnement, la justesse supérieure de l’expression et la grâce d’une vivacité contenue. Que ce géomètre rencontre un sujet digne de lui ; qu’il soit appelé à défendre les droits de la morale, du bon sens et de la conscience, et les richesses maintenant cachées de son beau génie se déploieront tout entières.

  1. Tom. IV, pag. 59 et suiv.
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