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chap. viii. — voyage par eau, etc.

prairies immenses où la Providence m’avait jeté, pour entreprendre ce long et dangereux voyage. Un sentiment de tristesse régnait dans mon cœur, et je ne sais quel pressentiment fâcheux me faisait regretter le genre de vie que j’avais mené depuis mon heureuse rencontre avec Lewis.

Je m’étais attaché à lui comme à un frère. Son intrépidité et son sang-froid dans le danger, la sagesse de ses conseils, son humeur égale, la sollicitude avec laquelle il veillait sur moi, son expérience profonde de la vie du désert, sa rude et droite franchise, tout faisait de lui un homme à part qu’il était impossible de voir sans être attiré vers lui et qu’on ne pouvait connaître sans l’aimer.

Et cependant notre voyage devait avoir pour but notre séparation, peut-être éternelle. Je ne voulus pas laisser deviner à Lewis les sentiments qui m’agitaient, et rejetant loin de moi mes sombres idées, je me préparai à partir.

Quand la nuit fut venue, nous nous embarquâmes, et ayant pris le milieu de la rivière, nous suivîmes le courant.

Le ciel était d’une pureté admirable, et quoique la lune ne fût pas sur l’horizon, on distin-