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chap. v. — inondation

en laissant voir à nu le roc où la marche des siècles les avait respectés.

Un éclair éblouissant illumina cette scène de désastre, et dès ce moment, les roulements formidables du tonnerre ne cessèrent pas de se faire entendre répercutés en échos éclatants. Le grondement sourd et lointain que j’avais entendu se rapprochait, et à la lueur des éclairs, j’aperçus une ligne blanche barrant toute la largeur de la vallée s’avancer avec impétuosité sur la pente rapide. C’étaient les eaux descendant des hauteurs et se précipitant dans l’espace ouvert devant elles.

En quelques minutes, comme l’avait dit Lewis, elles couvrirent toute la plaine qui s’étendait à nos pieds et ne formèrent plus qu’un fougueux torrent qui charriait dans des flots d’écume des arbres énormes, des rochers et des cadavres d’animaux surpris avant d’avoir pu trouver un asile.

Seul, un ours gris, probablement celui qui avait passé près de nous, nageait vigoureusement au milieu des eaux. Il cherchait à gagner quelque point du terrain non encore immergé. Nous le vîmes s’accrocher aux branches d’un arbre, rouler avec lui vers le bas de la rivière et disparaître à nos regards.