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chap. ii — éducation de wilhelm.
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Ils furent heureux d’entendre les bêlements d’un animal domestique, pensant qu’ils n’étaient pas éloignés d’une habitation dans laquelle ils espéraient se faire renseigner sur la route qu’il leur fallait suivre. Mais quelle fut leur surprise en voyant un enfant baignant dans le sang, car le loup en ayant beaucoup perdu, Wilhelm en était couvert. Ils crurent d’abord à un assassinat, mais ayant aperçu le loup étendu mort, ils furent bientôt au fait de l’événement.

Un des chasseurs, qui avait quelques connaissances en chirurgie, visita les blessures de l’enfant ; il reconnut qu’elles étaient légères et que l’évanouissement avait plutôt été causé par l’émotion et la fatigue du combat que par la gravité des morsures. Il avait été prolongé par le froid qui avait augmenté l’engourdissement. Plusieurs gouttes d’un cordial suffirent pour ranimer Wilhelm et le mettre en état de raconter l’aventure qui lui était arrivée.

Les chasseurs le félicitèrent sur son bon cœur et sur son intrépidité, et comme il était trop faible pour marcher seul, ils s’empressèrent de le reconduire chez Berchtold.

Nous n’essaierons pas de dépeindre l’entrevue qui eut lieu entre Wilhelm et son père. Le pauvre homme tout en le louant de son courage et de son sang-froid, ne pouvait s’empêcher de le blâmer de son imprudence. Il était heureux de voir le caractère résolu de son cher élève, et tremblait à la pensée qu’il aurait pu perdre celui qui faisait toute sa joie.

Cette aventure décida de l’avenir de Wilhelm.

Un des chasseurs, le baron de Wolfensheim, qui possédait un superbe château à huit kilomètres de la maison de Berchtold, vit avec plaisir que son fils, enfant de treize ans, qui l’accompagnait, était frappé du courage que le jeune paysan avait déployé. Il causa avec Wilhelm, reconnut qu’il avait d’excellents principes moraux, qu’il désirait s’instruire et qu’il aurait bien voulu posséder quelques livres ; aussi accueillit-il avec plaisir la demande de Stanislas, son fils, lui fit de permettre à Wilhelm de venir à Wolfensheim voir la bibliothèque.

Dès ce moment les visites de la maisonnette au château devinrent fréquentes. Souvent Wilhelm assistait aux leçons que le jeune baron recevait ; de retour chez lui, il se rappelait ce qu’il avait entendu et essayait d’étudier avec les livres qu’on lui prêtait ; Stanislas l’aidait dans ses efforts, et le baron était charmé de voir l’émulation qui existait entre eux.

Les ouvrages que Wilhelm dévorait avec le plus d’ardeur étaient les récits de voyage. Les dangers et les périls courus par les hardis explorateurs dont il lisait les relations enflammaient sa jeune imagination. Il se voyait dans ses rêveries le héros d’aventures extraordinaires, il lui semblait que la forêt Noire et tout le pays qui l’entourait étaient trop petits pour qu’il pût y vivre, et l’affection vive et profonde qu’il ressentait pour son père, était le seul lien qui le retenait à Freudenstadt. Il lisait aussi des traités d’histoire naturelle et apprenait à déchiffrer les mystères de ce grand livre de la nature toujours ouvert devant nos yeux. Il causait souvent avec le baron, qui était fort instruit, et son intelligence se développait avec une rapidité remarquable. Avec cette activité d’esprit qui est le propre des natures d’élite, il voulait tout connaître, tout approfondir, et c’est ainsi que, sans négliger les exercices du corps, l’équitation, la chasse, etc., etc., il put encore apprendre l’anglais, le français, et effleurer une foule de connaissances qui devaient lui être si utiles dans l’avenir.