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LES ÎLES DANS

armada laisserait aux flots oublieux du Saint-Laurent, l’aurait-il cru ?

Un vent frais poussa bientôt l’escadre hors du bassin de Gaspé. En le débouquant la brise fléchit, le calme se fit : et, une pluie fine se prit à tomber pendant qu’au large le brouillard se faisait. Bientôt il enveloppa la flotte, ne laissant voir que de fois à autres les voiles d’une frégate ou d’un transport, qui tâchaient de garder autant que possible leur ligne de bataille pour éviter le boulet que chaque commandant de division avait ordre de leur envoyer, dans le cas où ils s’en sépareraient. Ceci dura toute la journée du 22 août, mais le soir le vent se prit à souffler en foudre, le brouillard devint de plus en plus intense, la sonde ne mordit pas, et comme depuis le mardi les vigies n’avaient pas signalé la terre, on calcula par estime qu’on serrait de près le Nord.

L’officier de loch venait de faire une erreur de quinze lieues !

Paradis consulté, fut alors d’avis de mettre en panne avec les amures à bâbord, tout en ayant soin de se tenir la tête au sud au moyen du perroquet d’artimon et du grand hunier.

Deux heures et demie se passèrent à faire cette manœuvre, et l’amiral venait de se mettre au lit, quand tout à coup, le capitaine de l’Edgar crut entrevoir la terre. D’après de nouveaux calculs, il en était arrivé à la conclusion que c’était la côte sud, et courant avertir son supérieur, il reçut l’ordre de faire des signaux à la flotte pour qu’elle virât immédiatement vent arrière, et recommençât la même manœuvre, avec les amures à tribord.

Un jeune officier du régiment du général Seymour, le capitaine Goddard, se trouvait alors