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LES ÎLES DANS

Irlande. Ces beaux sentiments trouvèrent un écho fidèle chez l’amiral Walker ; et il s’était occupé à les consigner dans une ronflante proclamation, bien longtemps avant que sa flotte, âpre à son œuvre de destruction, se fût mise à courir toutes voiles dehors, la poulaine tournée vers Québec.

À la hauteur du Cap-Breton, l’Edgar sur lequel était hissé le pavillon amiral, fut rejoint par le Chester qui mit à son bord le capitaine Paradis. Ce dernier commandait le Neptune de la Rochelle, petit navire de 120 tonneaux, armé de 10 canons, portant 10 hommes, dont 80 destinés à la garnison de Québec. Il avait été amariné quelques jours auparavant par le capitaine Matthews. Vieux loup de mer qui avait fait deux naufrages dans le golfe, et en était rendu à son quarantième voyage au Canada, le capitaine Paradis connaissait son Saint-Laurent par cœur ; et décidément, le ciel semblait se ranger du côté de l’amiral, en jetant sur sa route pareil pilote. Une récompense de cinq cents pistoles — soit deux cent cinquante louis — dont cent pistoles d’arrhes, fut promise au capitaine Paradis s’il voulait se faire le lamaneur de la flotte : une fois rendu à Québec, le prix du Neptune lui serait payé en entier, et sa vieillesse mise à l’abri du besoin.

Pour être juste envers le prisonnier de Walker, les mémoires et les documents du temps ne mentionnent pas s’il accepta ou refusa. La seule chose qui soit parvenue jusqu’à nous, c’est que Paradis, au dire même de l’amiral, ne se gêna nullement pour lui faire un sombre tableau des misères et des intempéries qui attendaient la flotte anglaise dans les eaux de la Nouvelle-France. Ces avis concordaient avec ce que le