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LES ÎLES DANS

nos industriels n’aient pas encore songé à exploiter cette source de facile revenu. En revanche. les Américains, qui sont à l’affût de tout, commencent à les connaître. Ils se sont aperçus de plus, que les œufs du margaux étaient d’excellent débit. À l’époque de la couvaison, leurs équipages descendent dans les îles où se réfugient ces oiseaux, cassent les œufs qu’ils trouvent dans les nids, pour en obtenir de plus frais ; puis, quand ce truc a réussi, ils chargent leurs goëlettes, mettent le cap sur Boston, et vendent leur cargaison 25 à 30 cents la douzaine.

C’est surtout au milieu des îles qui bordent la côte du Labrador, que cette désastreuse industrie s’exerce. L’abbé Perron, longtemps missionnaire à Nastashqouan, écrivait à ce sujet : « De peur que leur larcin soit découvert, les Américains enfouissent dans le sable les quarts d’œufs qu’ils ont ramassés, ou les descendent au fond de l’eau, jusqu’à ce qu’ils en aient assez pour former une cargaison. Lorsque ceux qui ont échappé à leurs perquisitions ont été couvés et sont éclos, ils viennent de nouveau parcourir nos îles, tuent le gibier, enlèvent sa plume, et abandonnent par monceaux sa chair à la corruption. »

Trois jours après notre départ, le Rocher-aux-Oiseaux fut saccagé par ces écumeurs de nids ! Ne serait-il pas temps de défendre sévèrement ces excursions périodiques qui tendent à exterminer notre gibier ? Ces gens-là ne sont pas difficiles sur les œufs : ils empilent à fond de cale tous ceux qui leur tombent sous la main. Ces palmipèdes ne sont pas les seuls êtres ailés qui aient élu domicile sur le Rocher-aux--