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LE GOLFE SAINT-LAURENT.

qui paît encore dans les forêts de la Lithuanie, se rencontrait jadis en France. Le loup a disparu de la Grande-Bretagne ; le cerf à bois gigantesque a déserté l’Europe ; le castor n’y est plus qu’extrêmement rare, de même que la tortue, la loutre et le lynx. Le bouquetin ne se voit plus que dans les Pyrénées et les Alpes, et l’ours dans les montagnes de la Suisse. Enfin, il y a plus d’un siècle que l’oiseau appelé le doute a disparu de l’Île-de-France. La même chose se voit en Amérique. Le cachalot, la vache marine n’ont pas été vus dans le golfe depuis plus de soixante ans. La morue qui se péchait autrefois jusqu’à Kamouraska, se rend à peine à présent à Rimouski[1]. Le cerf du Canada qu’on chassait jadis sur les bords du Saint-Laurent ne se trouve plus que dans l’ouest : le castor et l’orignal y sont devenus rares. Le lynx roux a quitté l’est du Saint-Laurent, et le dindon sauvage qui était si commun sur les bords du lac Huron, ne s’y rencontre plus que rarement. »

Aux judicieuses observations de ce naturaliste, j’ajouterai l’expérience des enseignements de l’histoire. Pendant plus d’un siècle et demi, l’anguille fut une des principales ressources de nos habitants : ils en prenaient des quantités prodigieuses entre Trois-Rivières et Québec. En 1646 le Journal des Jésuites rapporte que la seule pêcherie de Sillery en donna quarante milliers ! Que devient aujourd’hui cette branche importante d’un commerce jadis si lucratif ? Faute d’avoir été protégée, l’anguille va diminuant de jour en jour. Du temps de Charle-

  1. (1) Elle ne dépasse guère Matane, maintenant.