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LES ÎLES DANS

réduit : et seule sa lueur l’éclaire à la veillée, car le ministère de la marine ne fournit pas le luminaire.

La provision réglementaire d’un dépôt de naufragés consiste en quinze quarts de farine, sept quarts de pois, du sucre, du thé, et sept barils de lard[1].

Tant pis pour ceux qui arrivent les derniers à cette hôtellerie de la mer. D’autres y étaient passés auparavant : et la ration quotidienne donnée à l’équipage de l’Alexina ne se composa que d’une petite mesure de pois, d’une livre et demie de farine, et de trois-quarts de livre de lard. Desprès fut acclamé cuisinier en chef de cette bande d’affamés ; et comme la batterie mise à sa disposition ne se composait que d’un poêlon, ainsi que d’un plat de fer-blanc, et que les couteaux étaient surtout remarquables par leur absence, il eut un trait de génie, en se promenant un jour sur la grève. Remarquant une large coquille, il la ramassa et y adapta une pince en bois. Ses camarades en firent autant ; et on peut s’imaginer tous les services que cette cuillère improvisée rendit alternativement, à la purée aux pois et aux vareuses des naufragés de l’Alexina. Le frugal menu détaillé plus haut ne rappelle pas précisément celui des Frères Provençaux : et que de fois les gardiens du phare, se laissant attendrir par la vue des maladies et des privations qui fondent sur ces délaissés, ne leur fournissent-ils pas des provisions prises sur leur propre réserve.

  1. En 1874, on a ajouté à ces provisions, deux boites de viandes en conserve, et douze couvertes.