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à la brunante.

Le vieil abbé n’avait pas franchi la dernière marche du perron que déjà Jules tout atterré par sa présence, se tenait respectueusement à ses côtés, interrogeant de l’œil la servante Gertrude qui pour toute réponse fit briller une grosse larme sous ses cils gris, en dirigeant un regard muet vers l’appartement de Rose.

Jules y était arrivé avant ce coup d’œil chargé d’angoisses.

Hélas ! Le bal Bernard avait eu le dénouement qu’a décrit un poète :

Dans les lustres blêmis on vit grandir le cierge,
La mort mit sur son front ce grand voile de vierge
            Qu’on nomme éternité !

Déjà Rose ne pouvait plus parler, et depuis trois quarts d’heure une angine couenneuse s’était déclarée, à la suite de l’action traîtreuse du chaud et du froid.

En ce moment, elle avait ce délire effrayant de calme et de majesté qui précède certaines agonies, car pour la pauvre Rose l’agonie approchait, et — cela est bien triste à dire — le docteur Buteau ne se trouvait pas là pour en surveiller les terribles progrès, les arrêter, les modérer ou les couper net grâce à sa science incontestée. Il était précisément parti depuis une heure pour aller faire les couches de Josephte Brochu la fileuse, qui demeurait à deux grandes lieues de là.

Le vieux Bernard avait bien essayé tout ce que l’amour paternel pouvait lui suggérer de plus propre