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le baiser d’une morte.

min du dehors, j’entrevis le profil immobile et pâle de la figure, qui appartenait autrefois à ma pauvre mère !

En ce moment, Ursule poussa un grand cri, qui éveilla l’enfant. Elle avait vu, elle aussi, et cette nuit là ne fut plus qu’une longue prière pour nous deux.

Que dois-je ajouter, Mathurin, à tous ces épouvantables détails ?

Pendant six nuits, l’invraisemblable apparition s’en vint comme cela, baiser au front notre cher Joseph. J’avais tout essayé ; les prières, l’aumône, les messes, rien n’y faisait, et pourtant je ne devais pas me résigner à ces transes continuelles, car Ursule dépérissait à vue d’œil, et le petit qui commençait à parler, se plaignait de voir chaque nuit une figure ensanglantée se pencher sur lui.

Un soir donc, ne sachant plus où donner la tête, je fis un vœu à la Sainte-Vierge. En échange du bonheur de ma mère, je m’engageai solennellement à consacrer au culte de la chaste mère du Sauveur, la liberté de mon fils, et de l’élever de manière à en faire un de ses prêtres les plus dévoués. Je m’humiliai profondément, et puis je demandai humblement pardon pour tout le chagrin que j’avais causé à la chère morte.

Cette nuit-là, nous fûmes tranquilles.

Probablement ma mère avait achevé son temps d’épreuve, et elle ne renouvela plus cette expiation,