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les blessures de la vie.

honte de l’aumône, lui qui n’aurait pas craint d’être écrasé sous le fardeau du travail.

Longtemps le maître et moi nous causâmes des moyens à prendre pour lui venir en aide sans effrayer sa trop chatouilleuse sensibilité ; mais nos meilleurs plans, nos plus beaux projets allaient se heurter contre cette délicatesse de sensitive. Enfin nous convînmes de ne rien cacher au supérieur, nous en remettant à son tact et à son expérience.

Tout alla bien pendant les trois semaines qui se passèrent à attendre le premier février, époque de l’échéance de la modeste contribution mensuelle exigée des élèves externes par la direction du séminaire.

Ce jour-là, Paul vint déposer comme les autres ses cinq francs sur la table du professeur.

Celui-ci lui prit la main, et les lui remettant :

— Monsieur Arnaud, dit-il, je suis heureux de pouvoir vous annoncer que le supérieur de l’institution reconnaissant votre excellente conduite, s’honore en vous accordant une bourse.

Paul baissa la tête, balbutia quelques mots de remerciement et regagna timidement, gauchement, sa place, au milieu des applaudissements de la classe.

Le lendemain, son siège était vide.

Les jours se suivirent, passèrent ; le banc de Paul était toujours délaissé.

Inquiet de cette longue absence, je courus chez lui.