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histoire de tous les jours.

je réitérai mes remercîments à Paul qui voulut me reconduire jusque sur la première marche du balcon.

— Au revoir ! en classe, me cria-t-il, en appuyant tristement sur ces mots.

Ce déménagement supposé, ces dernières paroles surtout, m’indiquaient clairement que Paul ne tenait guère à une nouvelle visite à domicile.

Il appartenait à cette classe de pauvres qui subissent courageusement la misère, la faim, le froid, le manque d’amitié ; mais sentent toute leur énergie se fondre rien qu’à l’idée de savoir que quelqu’un peut s’apercevoir de leurs souffrances.

Pour s’épargner un regard de pitié, ils ne reculeront devant rien. Travaux, fatigues, peines, insomnies, ils entassent tout sur leur santé chancelante, et malheureux ils s’en vont dans la vie, revêtant leur indigence du luxe de l’orgueil, et n’acceptant au monde qu’une seule aumône, la douce croyance de penser que les bonnes âmes se laissent prendre à leurs délicats subterfuges.

J’allais dans la rue, songeant à ces tristes choses, lorsque tout-à-coup j’entendis une rude voix m’interpeller :

— Aie ! là-bas ! l’écolier ! comment avez-vous trouvé le compagnon ? Il n’est pas riche, celui-là, hein ?

Cette phrase interrogative m’était adressée par l’ouvrier qui m’avait indiqué le logis de Paul.

Puis, continuant avec cette volubilité des gens du