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à la brunante

glissa sournoisement Jérôme qui profita d’un moment d’hésitation marquée chez Jean Bart placé inopinément devant le lièvre de Bidou.

J’étais allé draver dans le haut de la rivière Matane et, par précaution, j’avais bouclé sur mon dos mon vieux fusil. À l’un des détours de la rivière, je me trouve tout-à-coup en face de deux superbes sarcelles qui se lissaient coquettement les plumes, à une demi-portée du talus. J’épaule et laisse tomber le chien ; rien ne vint : mon vieil ami s’était décidé à me rater compagnie. Je le prends, l’examine, et m’apercevant qu’en route j’avais semé la capsule je ne fais ni un ni deux : je frotte une allumette et l’applique sur le bassinet. Paf ! le coup part ; mais en me donnant une maîtresse tape qui me flanque à l’eau. C’était ce coquin de fusil qui s’était mis en tête de repousser, et je revins sur la berge tant bien que mal avec mes deux sarcelles. À peine avais-je mis pied à terre que je sens un fourmillement extraordinaire dans ce que le bourgeois s’obstine à appeler le poste Ergot. J’y porte la main sans façon et, que retirai-je, mes bons amis ? trois magnifiques truites que j’avais seinées avec mon fond de culottes, car je n’avais pas jugé à propos de faire un brin de toilette pour aller au bois et j’avais passé par hasard un pantalon percé et ventilé à jour, comme un filet.

— Cette pêche est vraiment miraculeuse, et je n’ai pas de peine à y croire, ajouta imperturbablement Jean Bart, car entr’autres choses extraordinaires,