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le fantôme de la roche.

M. Fraser, je veux faire quelque chose pour cette pauvre vieille dame Dubé. Demain, je vous apporterai cent livres, et en attendant je vous souhaite le bonsoir.

— Hourrah ! pour le chevalier, cria le capitaine Fraser, en le reconduisant vers la porte ; je m’associerai à votre bonne œuvre, et je donnerai autant. Bonne nuit, au revoir, cher Samaritain !

Il se faisait tard, lorsque les pas du chevalier commencèrent à se perdre sur le pavé de la rue Notre-Dame. Onze heures sonnaient à l’horloge de l’épicerie du coin, et le capitaine, après avoir jeté un regard dans l’obscurité du dehors, verrouilla fortement sa porte, essuya du revers de sa manche la vitre de la petite lanterne qu’il tenait à la main, et, avant de monter se coucher, commença l’inspection qu’il faisait chaque soir, dans son magasin.

Ballots de marchandises fraîchement arrivés d’Écosse, boîtes à thé venues de Chine, mélasses et guildives des Îles, eaux-de-vie de France, toutes ces bonnes choses de son commerce défilaient tranquillement sous le rayon pacifique de la lanterne de mon oncle. Partout l’ordre régnait : la nuit promettait d’être tranquille : à la porte résonnait le pas cadencé d’une patrouille, et de temps à autre arrivait un cri de détresse, poussé par le passant attardé, que les matelots pressaient pour recruter la marine de S. M. Britannique, représentée en ce moment par deux gros vaisseaux de ligne ancrés dans la rade de Québec.