Page:Faucher de Saint-Maurice - À la brunante - contes et récits, 1874.djvu/123

Cette page a été validée par deux contributeurs.

115
le feu des roussi.

accepté, et sa première visite était pour Cyprien avec qui il avait bu plus d’un joyeux coup, lors des interminables flâneries de jadis, sur les bords de la Grande-Rivière de Sainte-Anne.

Cyprien n’aimait pas trop à revoir ceux qui avaient eu connaissance de sa vie de jeunesse ; aussi lui fit-il un accueil assez froid.

Gendron ne put s’empêcher de le remarquer :

— Comme tu as l’air tout chose aujourd’hui, maître Cyprien ; est-ce que ça ne te ferait pas plaisir de me revoir ?

— Oui, oui, Daniel, ça me ferait plaisir en tout autre moment ; mais aujourd’hui c’est jour de pêche et, comme tu es novice, j’aime à te dire qu’on ne prépare pas en une minute tout ce qu’il faut emporter pour aller au large.

— Tiens ! je serais curieux de t’accompagner pour voir ça ; tu me donneras ta première leçon.

— Je veux bien ; mais si tu veux suivre un bon conseil, tu ferais mieux de profiter de ton dernier jour de liberté ; car on travaille dur par ici.

— Bah ! ça me fait plaisir d’aller jeter une ligne ; et puis ; nous parlerons du bon temps.

— Ah ! pour cela, non ! dit énergiquement Cyprien, je n’aime pas qu’on me le rappelle !

— Pourquoi donc, mon cher ? Nous buvions sec et nous chantions fort alors ! est-ce que cela n’était pas le vrai plaisir, Cyprien ?

— Daniel ; ce qui est mort est mort ; laissons ça là.