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LE MAHA-BHARATA.

À peine eut-il entendu ces paroles, le sensible Krishna, touché de compassion, abandonna soudain sa couche, son festin, Padmâ, son épouse, et accourut de la grotte, où il était alors. 2294.

« Yajnasénî appelle au secours, se dit-il, Krishna, Vishnou, Hari et Nara ! » Ensuite ce magnanime Dieu, la vertu elle-même, se cachant aux yeux, couvrit la femme opprimée de maints et maints habits. 2295.

À chaque fois qu’on arrachait son vêtement à Draâupadî, un autre de même forme, puissant monarque, apparaissait à la place. 2296.

Par cent fois, seigneur, des habits ou blancs ou variés dans les couleurs viennent, grâce à la protection, dont l’environne ce Dieu de la vertu, remplacer les habits arrachés. 2297.

Soudain, du milieu de ces rois, louant tous Draâupadî et blâmant le Dhritarâshtride, s’éleva un bruit épouvantable de voix confuses à la vue de ce prodige, le plus grand du monde. 2298.

Alors Bhîmaséna, broyant ses mains l’une dans l’autre, les lèvres tremblantes de colère, prononça d’une voix tonnante cette imprécation au milieu des rois : 2299.

« Kshatryas, qui habitez le monde, recevez de ma bouche ces paroles, qu’un autre homme n’a pas encore dites et qu’un autre ne dira jamais ! 2300.

» Si je n’exécute pas ce que vous allez entendre, monarques de la terre, que je n’obtienne jamais la route céleste, où marchent mes ayeux et mes ancêtres ! 2301.

» Oui ! quÀelle me soit fermée, si un jour, ayant brisé dans un combat sa poitrine, je ne bois pas le sang de ce scélérat insensé, l’opprobre des Bharatides ! » 2302.