Page:Fauche - Le Mahâbhârata, tome 2.djvu/570

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
548
LE MAHA-BHARATA.

» Ah ! ah ! j’ai gagné l’archer des Pândouides, l’ambidextre fils de Pândou ! Joue ton cher Bhimaséna, sire, il te reste encore à jouer ! » 2163.

Youddhishthira lui répondit :

« Le magnanime Bhimaséna aux épaules de lion, au regard de travers, aux sourcils flexueux, le meurtrier des ennemis, le premier des hommes, qui portent la massue, guerrier unique et tel que l’ennemi des Dânavas, le Dieu, qui tient la foudre, il n’existe pas un homme qui lui soit égal en force : il est dans les combats notre guide et notre conducteur. Eh bien ! je le joue contre toi, sire, ce fils de roi, qui ne mérite pas d’être un enjeu ! » 2164-2165.

À ces mots, Çakouni, résolu dans sa mauvaise foi, s’aide encore de la tricherie, jette les dés et lui dit : « Tu as perdu ! » 2166.

» Fils de Kountî, ajouta le vainqueur, tu as perdu une richesse immense, tes chevaux, tes éléphants et tes frères, dis s’il te reste encore quelque chose à perdre. » 2167.

« Je reste seul de tous mes frères, et, blessé, vaincu, répondit Youddhishthira, je t’offre moi-même pour enjeu ma personne bien maltraitée. » 2168.

À ces mots Çakouni, résolu dans sa mauvaise foi, s’aide encore de la tricherie, jette les dés et lui dit : « Tu as perdu ! 2169.

» Tu as fait une très-mauvaise chose, quand tu ajoutas à tes pertes celle de ta personne. La perte de soi-même, sire, est une faute ; car la liberté est une richesse, qui reste encore à celui qui perd tout. » 2170.

Après ces paroles, l’homme instruit à manier les dés dit à chacun des rois : « J’ai conquis au jeu tous les héros du monde, qui assistaient à cette grande partie ! » 2171.