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LE MAHA-BHARATA.

c’est un proverbe. Les rois, qui veulent subjuger l’univers, doivent savoir, quand il le faut, mettre en jeu la colère. 6845.

» Au temps que j’étais couché dans la cuisse, comme dans le berceau naturel de l’embryon, j’ai entendu les cris des Bhrigou, ces hommes de la classe, dont est ma mère, tués par les kshatryas. 6846.

« Quand ils tombaient dans le monde sous les coups des vils kshatryas, cette extermination des Bhrigou, depuis l’homme jusqu’aux fruits cachés encore au sein de la mère, fit naître en mon cœur une vigoureuse indignation.

» Mes pères et mes mères, au comble de la douleur, n’ont pas trouvé alors dans tous les mondes un seul allié, tant régnait la terreur ! 6847-6848.

» Comme nul défenseur ne venait s’offrir aux épouses des Bhrigou, ma noble mère me porta caché dans une de ses cuisses. 6849.

» Quand il existe chez les hommes une âme, qui sait mettre un obstacle au mal, on ne voit pas naître un seul malfaiteur en tous les hommes. 6850.

» Mais, si le mal ne trouve nulle part un bras, qui puisse l’arrêter, alors une foule d’hommes s’adonne à tous les crimes. 6851.

» Le souverain, qui le pouvait et qui n’a pas reprimé le mal, quoiqu’il en eût connaissance, est le complice même du crime, quelque vertueux qu’il soit. 6852.

» Voici quelle fut ma pensée : « Si mes pères n’ont pu sauver leur chère existence, attaquée par des rois et des monarques puissants, hé bien ! moi, dans ma colère, je me proclame le souverain de ces mondes ! » Il m’est impossible de céder aux paroles de vos saintetés.