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traverser de toutes Parts, ces Corps. Dira-t-on que leurs Mouvemens entremêlez facilitent le Passage de la Lumiere, sans craindre de voir en meme tems eclore la Demonstration du contraire ? Je dirai en passant, qu’un moien de composer des Corps, sans que leurs petites particules se touchent, seroit de faire par exemple, qu’elles s’attirent mutuellement dans une proportion, qui soit reciproque au Cube, ou au Quarré — quarré ou plutôt à quelque puissance fort elevée, comme la 1000e Puissance de la Distance. Et de placer le Point, ou ces Forces sont égales autour d’une même Particule, à une Distance convenable, et extremement petite. Dans cette supposition les Particules formeroient encore des amas entre elles, mais ordinairement sans se toucher les unes les autres. Cependant jusques à ce qu’on trouve une Cause Mechanique, qui puisse produire un tel Effet, une supposition de cette Nature regarde principalement la Metaphysique. Un composé tel que je viens de décrire pourroit s’écarter pour ouvrir incessament le Passage aux Raions de la Lumiere.

La Division que l’on peut faire de l’Or, s’étend presque au de la de l’imagination. Et la delicatesse des animaux, qui echapent à nos yeux demande une matiere soudivisée, presque à l’Infini, pour pouvoir fournir aux Fonctions de leurs Organes. Enfin les Phenomenes de la Pesanteur ne peuvent étre expliquez Mechaniquement qu’en suposant dans les Corps terrestres une Rareté qui soit infiniment au de la de ce qu’on pense. Que si toute la Nature demande cette Rareté inconcevable n’avoüera-t-on pas qu’il est d’ailleurs de la sagesse de Dieu, de fournir à tous les Phenomenes de l’Univers, avec la plus r petite quantité possible de Matiere: ou du moins de ne prodiguer la Matiere inutilement ?

On objectera peut être que, si ma Theorie touchant l’Infini etoit veritable, on pourroit aussi l’appliquer au Tems, et regarder l’espace d’un Jour, ou d’un Moment, comme étant en quelque sorte immense.

A cela je répons que le Tems est veritablement divisible, en une Infinité de Parties distinctes, pendant les quelles un corps se peut trouver successivement, en autant de Lieux differens. Et un Esprit peut avoir des Perceptions et des Idées toutes differentes entre elles. J’ajoute que l’Esprit de l’Homme est capable en ce genre d’un Effort au de la de tout ce que nous pouvons croire. Mais ce qui nous retarde, dans les Operations de nôtre Esprit, c’est qu’elles, sont liées, sur tout, pendant que nous veillons, avec les Mouvemens, qui se font dans notre Cerveau; et que ceux ci ne peuvent avoir qu’une rapidité trez limitée: parce que la Substance même de nôtre Cerveaux soufriroit d’un Mouvement trop prompt, et deviendroit incapable de servir aux Fonctions, auxquelles la Nature les destine.

On sçait cependant à combien de choses l’Esprit de l’Homme s’étend tout à la fois et avec quelle Clarté il peut decouvrir tout d’un coup, une demonstration fort composée, et qui ne pourroit s’expliquer, à un Homme, qui en seroit