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entiere facilité, par les Matieres, qui causent la Pesanteur, et les Phenomenes de l’Aiman. La chaleur du Feu donne, aux Masses des Métaux les plus grosses, des Mouvemens entremêlez jusques au Centre des Masses meme. J’entens de ces Mouvemens, dans les quels consiste la Chaleur et la Fluidité. Tout cela sans Dificulté supose une Rareté fort grande.

Mais quand l’Or n’auroit aucunes Pores, les Bois, qui n’ont que la vintieme Partie de sa Pesanteur specifique auroient nécessairement dix fois plus de vuide que de Plein.

Qu’on les fasse examiner au premier passant, pour savoir de liu, combien ces Bois ont moins de plein que de Vuide, et on reconnoitra si nos sens sont des Juges, qu’il faille ecouter dans cette Recherche. Et si nos sens nous trompent si grossierement ne peuvent ils pas encore nous tromper, par rapport à l’Or même ?

Les Generations et les Corruptions des Métaux et des Mineraux dans les entrailles de la Terre; et ce Passage continuel, à travers toute sa Masse, d’un Esprit qui donne la Naissance ou la Vie à tous les Etres et qui les amene à la Putrefaction, ne demandent-ils pas une terre trez poreuse et trez ouverte ? Et au contraire de quel Usage pourroit-il étre qu’elle fut presque solide ?

La fluidité des Liqueurs, comme le Mercure, l’Eau e. c. qui prennent d’elles-memes une surface si exactement polie, semble non seulement prouver la Rareté de ces Liqueurs, qui facilite le Mouvement de leurs Parties: mais donne même un soupson que leurs Parties les plus petites ne s’entretouchent peut étre pas. Et ce soupçon se trouve en quelque sorte confirmé par les Experiences, qui ont fait connoitre qu’en pressant deux Verres Objectifs convexes l’un contre l’autre, leurs surfaces ne se touchent pourtant pas, mais s’aprochent seulement plus ou moins, selon qu’on presse ces Verres avec plus ou moins de Force.

La Cause de la Pesanteur n’agit elle pas, sur les Masses des Planetes entieres, jusques à leur Centre, sans le moindre obstacle sensible? Avec de l’eau ou il y ait du savon dessous, on peut faire des Bouteilles ou Bulles beaucoup plus deliées que la partie d’un Pouce. Combien ne faut il pas de Couches de particules d’eau pour former ces Bouteilles en voutes? Je dis la même chose du Crystal, et des autres Corps transparens; car le Crystal est formé de l’Eeau.

Cependant la lumiere traverse en Lignes droites un nombre trez grand de ces Couches jusques à, plusieurs pieds de profondeur. Et comme les Experiences de Mr. Newton m’ont convaincu, que la lumiere consistoit en des corpuscules, qui se detachent des Corps lumineuses, pour venir jusques à Nous; et non pas dans une Ondulation de l’Air celeste; quelle prodigieuse Rareté ne faudroit-il pas concevoir dans le Crystal et dans l’Eau, pour faire que, non obstant un Nombre des Couches, qui est presque immense, il reste encore des chemins ouverts, en Lignes droites pour tant de Raions de Lumiere, qui peuvent