Page:Fatio de Duillier - De la cause de la pesanteur.djvu/28

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

conséquent le pouvoir de l’agiter, en quoi differeront ces Idées d’avec celles du Corps et du Vuide, si non en ce que les dernieres, sont incomparablement les plus distinctes ? Qui dit etendue dit une chose complete, uniforme par tout, absolument simple, à l’Idée de la quelle il ne manque rien, pour la rendre entiere à et parfaite. Et quelle seroit cette nouvelle Philosophie qui reconoissant dans la Matiere Solide, le pouvoir de l’agiter et d’écarter la Fluide, et de se faire un Passage à travers d’elle, voudroit neanmoins assurer, que tout cela se fait sans Reaction, sur la Matiere solide, et sans Resistence ; en un mot, sans qu’il y ait aucune difference par rapporte à la Matiere solide, d’avec ce qui arriveroit dans un Vuide parfait ? Enfin on ne sauroit voir rien de plus foible, que les preuves par les quelles les Cartesiens veulent persuader que toute Etendue est Matiere. D’ailleurs de ce que nous connoissons des Matieres, qui font un composé mol ou liquide, dont néanmoins la Force de resister et d’agir nous est palpable, par toutes les Raisons, qui nous assurent de l’Existence de ces Matieres mêmes, il ne s’ensuit pas, qui’il y puisse avoir quelque Matiere absolument depouillée de solidité, ou de Dureté. En effet rien n’empêche qu’un Amas de Corps durs, trez-petis, ne fasse un composé mol et qui cede très facilement au Mouvement des Corps grossiers. Quoi qu’il en soit, comme je demontre qu’il n’y a point d’autre cause Mechanique et Universelle de la Pesanteur, que celle que je donne, et qu’elle supose nécessairement le Vuide, il faut conclure ou qu’il y a du Vuide, ou qu’il n’y a point de Cause Mechanique de la Pesanteur. Et s’il n’y a point de cause Mechanique de la Pesanteur, il faudra, comme je l’ai déja dit ci-dessus, conclurre encore, par un autre retour qu’il y a du Vuide. La Raison en est, qu’il semble qu’on ne puisse s’empêcher en ce cas, de suposer que toute Matiere pese à Proportion de sa Masse. Mais il est aisé de démontrer que tout Etendue ne pese pas à Proportion de sa Masse. Ce qui établit la Distinction, qui est entre l’Etendue et la Matiere.

Suposant l’Existence de la Divinitée, la Durée ou le Tems, et un Espace absolument infini et entierement Vuide ; on demande par quel Artifice simple, et intelligible aux Hommes, Dieu pourroit produire dans cet Espace, ou un Monde, tel que nous le voions ; ou bien, un Monde, qu’il ne fut pas possible de distinguer, par aucun de ses Phenomenes, de celui qui nous est connu. C’est à, dire, qu’on demande une Idée simple, qui comprenne des Proprietez toutes semblables à celles de la Matiere.

Nous concevons d’abord, que les Parties de l’Espace, sont toujours intimement connus à la Divinité, aussi bien que celles du Tems.

Imaginez dans cet Espace Vuide sans y rien ajouter ou changer, la Figure d’une Sphere immobile, d’un Pied de Diametre ; qui ne soit rêvetue de rien de corporel, et qui ne differe du reste de l’Espace, qu’en ce que nous voulons ainsi l’imaginer à part. Et appellons cette premiere Figure spherique . Suposons maintenant que l’Esprit seul continuant d’agir à commence pour ainsi dire, à étre imaginée se mouvoir uniformement en Ligne droite, et d’écrire cent fois