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et de tout la Matiere, qui compose l’Univers, se manifeste evidemment d’ailleurs, par plusieurs preuves, aux quelles il n’est pas aisé de resister. Que mes supositions etant une fois accordées, elles s’entretiennent pour toujours d’elles mêmes et produisent ainsi des Effets d’une si grande Utilité, qu’ils semblent étre la premiere Base, sur la quelle Dieu à formé l’Idée du Systeme du Monde, et sur la quelle il à ensuite élevé la Structure des Animaux, des Plantes et des autres Corps particuliers, qui remplissent nôtre Terre et les Astres. Mais il n’est pourtant pas impossible, ni même hors de vraisemblence, que Dieu par une premiere Loi, ait établi que la Matiere s’attirât mutuellement, avec une force proportionelle à sa Masse, et reciproque au Quarré de la Distance. Je ne vois pas qu’il y ait, ni qu’il y puisse avoir un troisieme partie. Et comme le Vuide est egalément necessaire dans tous les deux, il paroit qu’on ne peut s’empêcher de le recevoir.

À cette premiere preuve, par où j’établis la nécessité du Vuide, on peut ajouter les suivantes. Premierement l’Etendue simple, nous donne toute une autre Idée que l’Etendue revêtu de Solidité ou d’Impénetrabilité, et de Mobilité. L’une et l’autré de ces Idées est claire, dans Nôtre Esprit. La premiere est cette Vuidé, et la plus claire des deux. L’autre est celle du Corps, ou de la Matiere. Je ne sens pas aucune subtilité de Métaphysique me les puisse jamais faire confondre, ou prendre pour une seule et même Idée. Scondement j’ai une Demonstration exacte, que le Mouvement ne sauroit étre aussi facilement en tous sens, que nous l’observons dans la Nature, s’il n’y avoit non seulement du Vuide, mais même incomparablement plus de Vuide que de plein. Suposons un Vuide parfait, ou avec les Cartesiens, une Matiere ou une Etendue, qui soit sans Action et sans Resistence, c’est à dire qui n’aide ni ne retarde aucunement les Mouvemens des Corps. Dans cette Etendue le Mouvement d’un Corps donné, sera parfaitement libre. Suposons dans la même Etendue une Poussiere fort rare ; ou une Matiere trez deliée, également dispercée de toutes Parts, dont les Particules soient separées et chacune en Repos ; et auxquels on restitue le Pouvoir de résister, que nous observons dans tous les Corps, par toutes sortes d’Experiences. Le Corps donné commencera de sentir de la Resistence à son Mouvement et cette Resistence sera d’autant plus grande, que la Densité de cette Matiere sera plus grande et le Corps donné moins grand et plus Poreux. Suposons maintenant les Parties de cette Poussiere diversement agitée en tous sens. Je demontre que la Resistence au lieu de diminuer par là, comme le voudroient les Cartesiéns, augmente au contraire, et augmente d’autant plus, que la Vitesse des Parties de cette Matiere dispercée sera plus grande. Qu’on rémplisse l’Espace d’une plus grande Quantité de la Matiere immobile, à la quelle on restitue, comme ci dessus, le pouvoir de resister. La Resistence augmentera sur ce Chef. Qu’on agite cette Matiere de plus en plus, en tous sens, et la Resistence augmentera toujours de plus en plus. Enfin qu’on remplisse tout l’Espace d’une Matiere immobile, et la Resisténce sera immense. Je n’ose