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un drôle de voyage.

On juge du succès qu’obtint sa réponse et du nombre de mauvais points qu’elle lui valut.

Jouait-il, sa voix dominait tous les bruits de la récréation. Il faisait plus de gambades en deux minutes qu’un autre dans une heure. Il sautait comme un chevreuil et pirouettait comme un toton. Ses maîtres l’appelaient M. Salpêtre. Ses camarades l’avaient, nous l’avons dit aux premiers mots de cette histoire, surnommé le brave Mimile.

Vous allez croire qu’il était batailleur, querelleur ; pas le moins du monde pour son compte, il était doux comme un mouton, mais pour le compte des autres, c’était un foudre de guerre ; pour défendre ses camarades opprimés, pour bondir au secours de son cousin Charlot, c’était un lion. Il avait en outre quelques qualités qui, au collège, passent à bon droit pour des défauts. Il connaissait à fond la cuisine qu’on peut faire dans un pupitre. Cette science, qu’on n’enseignait cependant pas à Chaptal, lui avait valu plus de pensums que ses devoirs ou ses leçons, car il ne se passait guère un jour sans qu’il confectionnât indûment quelque friandise à son profit, au profit de Charlot et de leurs amis communs.

Pour faire du chocolat dans une timbale, au risque d’incendier son pupitre, pour introduire des pommes de terre dans le four du poêle sitôt que le professeur avait la tête tournée, l’audacieux Mimile n’avait pas de rival. Les pommes de terre, passe encore, cela cuit discrètement, mais les marrons, quand on oublie de les fendre, comme cela lui était arrivé un jour, c’est une autre affaire.