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un drôle de voyage.

était encore temps de retourner chez vous ; nous changerions de direction ; ce serait très-vite fait.

— Nous sommes partis pour l’Amérique, s’écria le gros Charlot, rouge de honte, nous ne pouvons revenir qu’après l’avoir visitée tout entière. N’est-ce pas, Mimile ?

— C’est entendu, reprit Mimile d’un air décidé.

— Très-bien, mousses. J’aime qu’on ait du caractère… Et maintenant, le diable et la tempête peuvent faire rage sur le bâtiment, nous serons là pour leur tenir tête. »

Puis le chauffeur ajouta :

« En attendant, au travail ! au travail ! »

Charlot retourna à son charbon, et Mimile à son écope.

Leur travail, qu’ils commençaient à trouver très-fatigant, ne fut de nouveau interrompu que vers midi, heure du second déjeuner.

Charlot, de plus en plus noir, avait maintenant le visage de la couleur de ses mains ; il se fit peur à lui-même en se regardant à un petit miroir accroché sur le pont.

« Comme je suis sale ! murmura-t-il. Maman ne serait pas contente de me voir comme ça, et je n’aime pas ça non plus, moi. Tu es bien heureux, Mimile, tu n’as pas, comme moi, l’air d’un sac à charbon.

— C’est vrai, mais j’ai mes guêtres toutes mouillées… et maman serait bien tourmentée si elle le savait… Mais que veux-tu, Charlot ? il faut accepter ce qu’on ne peut empêcher.

— Ici !… les mousses !… cria le chauffeur, et que chacun vienne prendre sa part de pain et de rôti.