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découverte de l’amérique.

voulut que Charlot fût paresseux, et que Mimile, bien qu’il ne manquât pas de bon sens, fût si turbulent, que l’application souvent lui était difficile. Bien que les caractères des deux cousins fussent très-différents, ils s’étaient toujours entendus à merveille. L’un complétait l’autre, et c’était peut-être là le secret de leur mutuelle affection.

Le gros Charlot était naïf et crédule à l’excès. Son plus grand bonheur était de pouvoir écouter, la bouche toute grande ouverte, les histoires les plus extraordinaires. Il aurait passé ses nuits à en lire si la consigne de Chaptal le lui eût permis. Les récits de voyages, notamment, ne trouvaient pas d’auditeur à la fois plus attentif et plus ému, d’admirateur plus complaisant.

Les jours de congé, on le voyait le nez au vent, immobile et l’œil fixe, interrogeant le ciel et les horizons lointains pendant des heures entières. L’esprit du gros Charlot faisait évidemment plus de chemin que ses jambes et se lançait volontiers à travers les espaces.

M. Mimile, au contraire, était toujours en mouvement ; il était de ces enfants qu’on accuse d’avoir du vif-argent dans les veines et qui, plutôt que de se tenir tranquilles, trouvent mille moyens de remuer, même sur place. À l’étude, en classe, partout, en écrivant, en lisant, en faisant ses devoirs, il remuait ; quand ses mains étaient occupées, ses pieds sous table battaient la mesure. Il était si peu à ce qui se passait autour de lui, qu’un jour son professeur d’histoire lui demandant le nom de l’assassin d’Henri IV, il lui répondit, très-occupé qu’il était d’une marche de tambour qui se faisait entendre dans la rue : « Monsieur, je crois que c’est le rappel. »