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UN DRÔLE DE VOYAGE

venu à bout d’en faire jouer le pêne rouillé. Il y parvint. Cela fait, les trois amis durent réunir toutes leurs forces pour faire tourner la porte sur ses gonds. Enfin elle céda, et ils se trouvèrent en face d’un long souterrain sombre et humide, où ils s’engagèrent sans hésiter.

Après un quart d’heure de marche sur un terrain visqueux et inégal, sous une voûte dont la hauteur variait à chaque instant, ce qui fut pour chacun d’eux l’occasion de nombreuses bosses au front, ils aboutirent à une sorte de caverne qui avait son issue sur une forêt d’apparence magnifique. Jamais si luxuriante végétation ne s’était offerte à leurs regards ; des lianes s’enchevêtraient aux branches d’arbres immenses, cinq ou six fois séculaires.

« Oh ! s’écria Mimile, nous sommes, bien sûr, dans une vraie forêt d’Amérique !

— Ça, ce n’est pas douteux, dit Charlot.

— Mais ça, dit Giboulot en parodiant le ton de l’ami Charlot, ça n’est pas commode. J’attends maître Charlot à l’épreuve. »

Il n’attendit pas longtemps.

« Oh ! là ! là ! qu’est-ce qui me pique les mollets ? dit tout à coup Charlot.

— C’est vrai ! c’est vrai ! nous avons les jambes nues, grâce à ces affreux Nez-Rouges, je l’oubliais ; il faut prendre nos précautions avant d’aller plus loin. »

En cherchant bien, il découvrit une sorte de joncs très-flexibles ; alors, se faisant aider des deux cousins, l’industrieux Giboulot en eut bientôt une provision suffisante pour faire, à chacune de leurs six jambes, des jambières d’une épaisseur qui mît leurs mollets à l’abri