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UN DRÔLE DE VOYAGE

bile, fut apportée sur une brouette qui craquait sous cette grosse charge.

« Vous allez, continua le chef en s’adressant à nos petits amis, prendre l’un après l’autre ce poids de la main droite et l’élever jusqu’à la hauteur de votre œil. »

Giboulot s’avança, saisit le poids, mais ce fut inutilement, on le pense bien, qu’il essaya de le déplacer.

« À un autre, » dit le grand chef.

Mimile essaya à son tour sans plus de succès.

« À toi, » reprit le grand chef en s’adressant à Charlot.

Charlot répéta l’expérience et ne fut pas plus heureux que ses camarades.

« Pas un ne l’a enlevé… c’est grave, dit le grand chef d’un air soucieux… Mais non, il faut leur laisser une dernière chance. Qu’on emporte ce poids pour le présenter au grand sachem des Nez-Rouges, en lui demandant de le rendre aussi léger que l’air, s’il veut que les trois neveux du Vieux-Chacal soient reçus parmi nous. Autrement… »

Il n’en dit pas davantage, mais son œil eut un éclair sinistre.

On emporta le poids dans une cabane du voisinage où siégeait sans doute le grand sachem.

Quelques minutes s’écoulèrent pendant lesquelles nos trois compagnons, qui n’avaient pas la moindre confiance dans le pouvoir surnaturel du grand sachem des sauvages, se regardaient tristement à la dérobée.

Le poids fut rapporté, mais il ne devait avoir rien perdu de sa pesanteur, s’il fallait en juger par la démarche de celui qui le voiturait.