Page:Fath — Un drôle de voyage, 1878.pdf/250

Cette page a été validée par deux contributeurs.
208
UN DRÔLE DE VOYAGE

— Mais comment as-tu pu pénétrer chez eux, apprendre déjà tout cela, et pourquoi t’es-tu déguisé en sauvage ?… demanda Charlot.

— Vous allez le savoir. Vous n’avez pas oublié que je vous avais quittés pour aller à la découverte et reconnaître le terrain ?

— Non, dit Mimile, cela nous a même assez tourmentés de ne pas te voir revenir.

— Nous avons été très-inquiets pour toi… et pour nous, dit le véridique Charlot.

— Ne trouvant rien qui pût nous renseigner, j’allais toujours. Enfin, je m’arrêtai à dix pas de l’endroit où nous sommes. Je me disais, en apercevant des animaux qui m’étaient inconnus : Est-ce que je serais déjà, sans m’en douter, dans un autre pays que le nôtre ?… Et je me disposais à revenir sur mes pas dans l’intention de vous aller chercher, quand un être énorme, avec un nez très-long, très-gros et surtout très-rouge, sort tout à coup de terre, me saisit et m’enlève comme une plume, puis m’emporte encourant plus vite qu’un animal à quatre pattes. J’avais beau me débattre et essayer de lui donner de mon bâton sur la tête pour l’obliger à me lâcher, il n’en continuait pas moins sa course ; il me serrait un peu plus fort, c’était tout… Bref, il me fit entrer dans sa cahute, en referma la porte, me jeta à terre comme un paquet, s’assit devant moi sur une souche d’arbre et se mit à m’éclater de rire au nez, se caressant tour à tour le ventre et l’estomac, comme pour me faire comprendre que j’allais lui servir de déjeuner.

— Quelle horreur !… s’écria Charlot.