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UN DRÔLE DE VOYAGE

son séant pour jeter un coup d’œil scrutateur sur Mimile et Charlot.

« Ils dorment à poings fermés, » se dit-il tout bas.

Et, tirant un carnet de sa poche, il écrivit rapidement quelques mots au crayon. Ouvrant ensuite la porte le plus discrètement possible, il descendit l’escalier avec des précautions infinies, tenant à la main le papier qu’il venait d’écrire, et s’enfonça dans la forêt.

Cent pas plus loin, il s’arrêta à l’angle d’un épais fourré.

« C’est bien ici, » dit-il en regardant autour de lui.

Puis, sifflant trois fois d’une façon particulière, il attendit en prêtant l’oreille. Un homme parut bientôt.

Cet individu n’était autre que l’espèce de sauvage qui s’était mis à la poursuite de Mimile et de Charlot à leur sortie de la cabane de Mange-tout-cru, c’est-à-dire le second de cet affreux chef de bandits, l’homme qui était revenu de ses longs voyages avec une seule oreille et un seul mollet, et qu’on nommait le lieutenant.

« Eh bien ? demanda-t-il d’un ton bref à Giboulot.

— Voici, répondit l’ex-gardeur d’oies en lui remettant le papier où il avait précédemment écrit quelques mots.

— Ah ! répondit l’homme.

— Oui, nous les tenons ; tous deux sont là, complètement endormis.

— C’est bien ; à demain donc. À demain l’Amérique ! »

Le lieutenant de Mange-tout-cru prononça ces derniers mots avec une ironie peu rassurante et disparut.

Quant à Giboulot, se glissant comme une ombre au milieu des arbres, il retourna auprès de Mimile et de Charlot.