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UN DRÔLE DE VOYAGE

L’ex-gardeur d’oies chercha rapidement autour de lui, puis courut à un châtaignier dont il coupa une très-longue et très-forte branche… Il revint ensuite en courant au bord de la mare où les mauvais galopins continuaient à se débattre dans les angoisses de la peur.

« Les plus petits d’abord !… s’écria Giboulot en avançant la branche au-dessus de la mare.

— Remuez les mains et les pieds, battez l’eau, et vous n’enfoncerez pas, disait Mimile aux autres.

Trois enfants s’accrochèrent aussitôt au bienheureux branchage. Giboulot, aidé de Mimile et de Charlot, les attira jusqu’au bord, où il les abandonna pour secourir leurs camarades. Trois nouveaux enfants furent bientôt à terre, et le septième et le huitième ne tardèrent pas à les rejoindre, grâce aux efforts réitérés de nos trois amis.

Les petits vauriens offraient, il faut en convenir, un spectacle piteux. Ils étaient couverts de vase et d’herbes. Pliés en deux, les bras ballants, ils regardaient d’un air idiot la boue liquide qui dégouttait de toute leur personne. Ce fut alors que, pour compléter le tableau, on vit revenir clopin-clopant les trois chefs, qui avaient reçu leur contingent au début de l’action. On voyait que chaque pas était pour eux le sujet d’une vive douleur ; le principal des trois se trouvait, et c’était justice, le plus écloppé.

L’ex-gardeur d’oies, les voyant réunis, prit alors la parole avec l’aplomb d’un orateur consommé :

« Vous voilà dans un bel état, mes gaillards !… — Et il s’adressait plus particulièrement aux trois revenants. — Le bâton, dit-il, a fait justice de votre cruauté, et l’eau que vous destiniez à un pauvre animal a châtié la bêtise