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UN DRÔLE DE VOYAGE.

rembrunissait. La forêt où ils allaient se réfugier n’était qu’à quelques pas. Ni Mimile ni Charlot n’avaient encore assisté au spectacle grandiose que présente cette immense étendue d’arbres qu’on nomme une forêt. Ils venaient de s’arrêter au milieu d’un premier carrefour formé par trois routes ombreuses qui s’enfonçaient sous bois à perte de vue, et dont un point lumineux indiquait seul l’extrémité.

« C’est très-beau une forêt ! dit enfin Mimile.

— C’est effrayant aussi, balbutia Charlot ; il y a trop de silence. »

Pauvre Charlot ! il se plaignait vraiment que la mariée fût trop belle. À peine venait-il de se plaindre de n’être dérangé par aucun bruit, qu’une voix bizarre, qui partait on ne sait d’où, leur cria comme à travers un cornet :

« Ah ! ah ! Vous voilà par ici !… »

Mimile et Charlot eurent un tressaillement, et ils regardèrent assez longtemps autour d’eux sans apercevoir personne.

Un gros rire se fit entendre, un gros rire suivi d’un sourd bruissement de feuilles.

Puis une créature humaine dégringola d’un arbre, un gourdin à la main et un bissac sur le dos.

« Giboulot ! s’écria Mimile.

— Giboulot ! répéta Charlot. Ah ! comme il m’a fait peur.

— Peur ! dit Giboulot, y a pas de quoi. Eh oui, c’est Giboulot. J’ai appris par Mme Hubert que vous étiez partis en forêt, et j’ai planté là mes oies et mes dindons pour m’en venir avec vous.