— … Mais j’ai vingt-cinq ans de plus que vous, et une expérience pénible du mariage. Eh bien ! soyez-en persuadé, vous n’aurez de joie, dans votre maison, qu’en élevant jusqu’à vous l’esprit de votre femme. Elle n’est pire ni meilleure qu’une autre. Façonnez-la. Soyez patient et ferme…
M. Gabriel Barrier, grave, opinait de la tête.
— Allons donc ! – cria madame Dax. – Mon bon, une femme est comme ci ou comme ça, mais on ne la change pas. Vous allez prendre la vôtre telle que la voilà : pas bien maligne, un peu molle, mais honnête et bien élevée, – élevée par moi. – Gardez-la comme elle est, et laissez-la vivre tranquille…
Elle jeta vers son mari un regard de dédain.
— … Seulement, c’est toujours ceux qui n’ont pas réussi qui se mêlent de prêcher les autres !
Quand elle s’échauffait, madame Dax, malgré vingt années vécues loin du midi natal, retrouvait au bout de ses mots des sonorités provençales, un brin d’accent ancien, qui épiçait le parler lyonnais, traînard et chantant, comme d’une pointe d’ail.
— Soyez tranquille, madame Dax, – affirma promptement le docteur Barrier ; – mademoiselle Alice et moi, nous nous entendrons très bien, et je vous parie votre prochain voyage en Suisse qu’elle fera une maîtresse de maison hors ligne…
Il s’interrompit pour envelopper d’un coup d’œil flatteur, madame Dax d’abord et M. Dax ensuite, et conclut :
— Elle a de qui tenir !