Il y a là-dedans, – affirmait le journaliste, – plus de qualités qu’il n’en faut pour faire un chef-d’œuvre ; et plus de défauts aussi, mais de beaux défauts. C’en est un que d’allier dans les mêmes pages le plus déterminé scepticisme avec la passion la plus outrancière. Mais ce défaut-là nous transporte bien loin des livres fabriqués trop habilement par les manufacturiers de la littérature. Le roman de Carmen de Retz casse beaucoup de moules, heurte beaucoup d’habitudes, rudoie beaucoup de préjugés…
… Trop de préjugés, hélas ! Il y a des préjugés qui consolident profitablement la religion et la morale ; et ces deux vieilleries, quoi qu’on en médise, ont encore du bon ; je ne vois guère par quoi les remplaceraient ceux qui s’efforcent d’en faire table rase. Carmen de Retz appartient à cette phalange révolutionnaire. Il faut le regretter deux fois, car c’est un très beau talent qui sert là une très vilaine cause. Les jeunes filles ne liront pas Sans savoir pourquoi ; les jeunes femmes même feront sagement de s’en abstenir. Il faut des imaginations aguerries pour affronter sans vertige tant de paradoxes étincelants, tant de beaux mensonges séducteurs, au fond desquels rien ne se trouve que le plus terrible des nihilismes, – le nihilisme du bien et du mal, destructeur de tout.
Oui, l’auteur de Sans savoir pourquoi nie le bien et nie le mal, mais cette négation redoutable va sans amertume ni pessimisme, au contraire, avec infiniment de désinvolture ! Et cette désinvolture qui