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JEAN-PAUL

— Vous voulez à tout prix qu’on vous fasse mal. Je me rends avec regrets à vos exigences. Je vais vous blesser au cœur, mais à la manière des chirurgiens, d’une blessure qui guérit.

Puisant dans le même tiroir, il en tira une lettre qu’il déplia avec lenteur, hésitant encore. Enfin, d’un geste décidé, il la tendit à Jean-Paul : « Lisez cela, pendant que je vais m’absenter un instant. » Et il sortit aussitôt, non qu’il eût affaire à partir, mais il voulait épargner charitablement l’humiliation d’un témoin à ce fier enfant qui allait recevoir une brutale injure.

Jean-Paul saisit la lettre et fut d’abord très étonné de reconnaître l’écriture de Gaston : « Quoi ! il aurait écrit au Père… à mon sujet… je ne comprends rien… » Mais non, l’en-tête de la lettre portait : « À mon cher Robert ». C’était une lettre à Jobin. Il lut :

Mon cher Robert,

Parle-moi d’une farce ! En revenant de chez vous, l’autre jour, je suis passé au bureau de poste avec Ti-Jean-P., très impatient d’avoir un accusé de réception pour sa boîte de chocolats. Quelle catastrophe ! Le pas fin avait envoyé une lettre, à mon insu, à l’adresse que tu connais ; et la lettre, évidemment revenait avec cette indication : « Inconnu ». Tu devines mon embêtement. J’avais toujours eu soin, comme tu sais, de me faire donner les lettres afin de les remettre moi-même à ta sœur