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PREMIÈRE BLESSURE

la gauche, se dresse l’église paroissiale, assez vaste construction de granit rouge, à trois nefs, surmontée d’un clocher de pierre, style basilique. « Priez Dieu », venait de lui dire monsieur le Curé. Elle voulut le faire sans retard et pénétra dans l’église, à ce moment déserte. Une lumière blanche tombait des fenêtres supérieures, illuminant la voûte en charpente et faisant traîner sur le parquet une longue nappe pâle. Le chœur, derrière quatre arcs romains qui supportent un dôme carré, apparaissait lointain dans une pénombre discrète. La pieuse femme longea la grande allée, s’avança jusqu’à la balustrade et s’agenouilla sur le degré. L’horloge, au-dessus de la porte qui s’ouvre sur la sacristie, marquait près de six heures. Combien de temps pria-t-elle ? Elle l’ignora elle-même. Mais elle égrena son chapelet, s’arrêtant pour méditer, pour parler à l’Hôte du tabernacle, pour pleurer aussi, à certains moments. Toute son âme semblait passer dans cette oraison, la plus ardente peut-être de sa vie. Quelle promesse fit-elle à Dieu ? à quel sacrifice consentit-elle ? Personne ne le saura jamais. Mais, à la fin, son visage retrouva le calme, et son cœur la confiance. Elle se leva, rassurée, et sortit de l’église tandis que le crépuscule dressait là-bas, du côté du lac et derrière sa maison, une immense flambée de lumière et de gloire.