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JEAN-PAUL

sérieux et très joyeux, Roland avait développé en lui une personnalité pleine de promesses. Doué d’un remarquable talent littéraire, ayant remporté tous les premiers prix, et même le prix « Gagné » (du nom de l’ancien élève qui le donne, chaque année), en discours français, il songeait à mettre sa plume et sa parole au service des bonnes causes. Un apôtre-né. On le connaissait pour son initiative, son entrain et son habileté dans les organisations. Le Père Beauchamp en était fier.

Non pas qu’il entendît le canoniser sans délai. Bien des fois, il arrêtait son ardeur intempestive, lui disant : « Voyons, Roland, voyons ! N’allez pas si vite, et puis défiez-vous de vous-même. Plus de modestie ne serait pas de trop chez vous. » D’autres fois, en revoyant quelques-uns de ses écrits, que Roland lui soumettait volontiers, il lui répétait un aveu de Louis Veuillot : « Qu’il est difficile d’avoir de l’esprit et d’être charitable ! » N’importe, se disait le Père, un peu d’expérience limera les arêtes trop vives, et le bloc solide restera.

Toujours est-il que ce soir-là, le Père Beauchamp, sans avoir l’air d’y toucher, proposa à Roland une bonne action : « Dites donc, mon ami, maintenant que vous avez été élu président du Cercle St-Michel, vous devez vous préoccuper de recruter des membres. Jean-Paul Forest ne fait pas partie du Cercle. Faites-le entrer. Je crois même qu’un apôtre auprès de lui trouverait de quoi faire. »