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JEAN-PAUL

en contrebande. Lentement ils cheminèrent dans une allée qui longe « l’étang » ou bassin de forme ovale entouré d’une promenade surélevée.

Le soleil déclinait à leur gauche, derrière l’immense jeu de balle-au-mur qui projetait sur le champ de baseball une large traînée d’ombre. La haute ceinture d’arbres, qui encadre les terrains de jeux, était immobile et brillante. Pas une feuille ne bougeait. On aurait dit que tout s’était subitement figé dans un silence de dortoir. Les deux prêtres s’arrêtèrent à mi-chemin, impressionnés par le paysage d’ordinaire si joyeux et maintenant si grave. Le Père Beauchamp s’approcha d’un tronc d’arbre et tenta de déchiffrer quelques lettres toutes fraîches que des élèves avaient tracées sur l’écorce.

— Ils nous ont laissé leur carte, dit-il, en essayant de lire.

— Pas leur cœur, répliqua son compagnon.

— Qui vous l’assure ?

— N’en doutez pas, ils sont partis, bien contents de se débarrasser de nous.

— Quel pessimisme ! Ils sont contents de retrouver leurs parents. Très bien cela. Autrement nous aurions déformé leur cœur au lieu de le former. Mais nous l’aurons agrandi assez, j’espère, pour qu’une place nous reste sans tasser personne.

Tout en se communiquant leurs regrets, leurs déceptions de l’année et aussi leurs espé-