Page:Farley - Jean-Paul, 1929.djvu/130

Cette page a été validée par deux contributeurs.
128
JEAN-PAUL

ils avec une autre mesure. Gaston appréhendait non sans raison une volte-face contre lui.

Devant cette perspective, il lui prenait une envie folle de disparaître, de fuir ailleurs, n’importe où. Traînant un gros sac de voyage, il entra bientôt en transpiration. Il s’arrêta haletant, hors d’haleine. Puis, reprenant son fardeau, il se relança, la tête dans le vent, en grande hâte de s’éloigner…

Peu de temps après, les élèves descendirent dans la cour pour la récréation de quatre heures. Ils apprirent avec émotion le départ de Gaston Gervais. Sur le jeu de balle, on discutait son cas. Jean-Paul ne disait pas un mot. En sa présence, des camarades indélicats faisaient l’éloge du disparu : « Ça n’empêche pas, déclarait Dubeau, que notre équipe de hockey aura perdu son meilleur joueur. » Bonin prétendait que l’équipe de baseball souffrirait davantage. « Hé ! Jean-Paul, cria quelqu’un, ton receveur à la balle… Tu dois avoir de la peine de le savoir parti ? »

La cloche sonna la rentrée. Dans son clocher couvert d’un capuchon blanc, elle ne faisait entendre qu’un son rauque et sourd. Néanmoins les élèves s’ébranlèrent, et lentement partirent à la file. Enfonçant le menton dans leur col relevé, ils fredonnaient déjà des airs de Noël. La brunante qui tombait laissait quand même pressentir une nuit lumineuse, la nuit pure de Noël.