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Fouquet est un de ces endroits qui ne peuvent passer de mode qu’à la suite, il faut bien le dire, d’un bombardement. Et encore ! D’autres cafés, d’autres restaurants périclitent, perdent leur clientèle, ferment leurs portes et font faillite. Le Fouquet persiste, comme un organe indispensable au bon fonctionnement de la santé parisienne. C’est un endroit à potins d’hommes, car les hommes sont aussi concierges que les femmes. C’est là qu’en des temps de rentrées les hommes vont se conter leurs bonnes fortunes de l’été. C’est là qu’ils se mendient des tuyaux de Bourse ou de Courses dont la plupart n’ont pas besoin, car le Fouquet peut se vanter de donner asile aux grosses fortunes, mais, comme dit l’autre, il faut bien vivre comme on vit à Paris… Quel Paul Bourget nous donnera le roman de l’homme-avion, de l’homme-cocktail, à la fois sportif et mondain, affecté et cultivé, insupportable et charmant, des années 1930-1938 ? S’il existe et qu’il manque de documentation, qu’il aille au Fouquet, Bibliothèque Nationale du parisianisme élégant.

À qui souvient-il encore de l’époque où, sur le plan des cafés, les Champs-Élysées ne brillaient que par le Fouquet ? Ils étaient nobles et nus. Soudain, des cafés ont surgi comme une équipe de coureurs ! Le Berry, devenu le Triomphe, le Colisée, le Marignan, le Longchamp, le Normandy, le Florian, flanqués des escadrilles de « George V », de « Champs-Élysées », de « Marly ». Une vraie flotte. Il semble qu’il y ait eu dans le passé une nuit pendant laquelle les Parisiens auraient pris