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d’organiser des banquets corporatifs dans le sous-sol. Bien sûr, on y vit Damia, et d’autres, à ces fêtes, mais un banquet est un banquet, et le groupe initial ne faisait plus que de courtes apparitions dans le quartier. Il avait horreur de ces jeunes filles à cocktails qui conduisent ventre à terre dans Paris, et de ces administrateurs, habitués, depuis qu’il y a des bars, à jeter leurs mégots dans les soucoupes des autres. De la rue de Penthièvre aussi il fallut partir un jour. Moyses, dont la sœur venait de se marier avec Henrion, qui prenait le « Grand Écart », se mit à la recherche d’un endroit nouveau et s’arrêta à l’avenue Pierre-Ier-de-Serbie, où fréquentent, me dit-on, des snobs en rupture de smoking, toujours un peu en extase devant les métèques du cinéma qui hantent les hôtels voisins et se hasardent parfois à venir prendre un verre au « Bœuf », avec le sentiment de s’encanailler et de frôler le vice parisien, et dont Moyses saura bien s’absterger.

Quant à ceux de la bande Boissy-d’Anglas, ils ont des enfants, des dettes, des postes. J’en rencontre parfois au coin d’une rue ou dans le salon de quelque vieille dame. C’est à peine si nous échangeons une poignée de souvenirs…