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énigmatique parfum, riche d’anecdotes, dont s’emplit le porche.

L’humilité du grand Carnegie

Citons au badaud que troublent les manies de la cliente milliardaire un acte de modestie qui vaut aussi son pesant d’or. Un jour, Carnegie, le vrai, et qui était tout petit, se présente timidement au Ritz. Aussitôt le personnel, au grand complet, de mettre les plus somptueux appartements de la maison à sa disposition, à commencer par le célèbre appartement Empire du premier étage. Or, Carnegie ne se trouvait pas « à l’échelle ». Il se regardait dans les glaces, courait aux fenêtres, s’évaluait devant la colonne Vendôme et ne se montrait pas le moins du monde enthousiasmé. Finalement, sur sa prière, on lui donna la chambre la plus petite du Ritz, qui était sur les jardins, et il se mit à sautiller de bonheur.

Bel exemple de simplicité et même d’humilité, que l’on pourrait faire imprimer sur papier couché, en gros caractères, pour Mme O…, cliente autoritaire, absurde, capricieuse, arrogante, qui faisait aux femmes de chambre des scènes terribles parce que les chaises de son appartement, disait-elle, étaient asymétriques. Les femmes de chambre s’inclinent, se retirent, se concertent avec les garçons d’étage et font changer les meubles, sans le moindre murmure de protestation. Le personnel d’un hôtel digne de ce nom