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Après ces réflexions générales, applicables à la marche de toutes les périodes de cette maladie, il convient maintenant de signaler un autre fait également relatif à l’évolution de cette affection, dont on retrouve des preuves dans les observations de tous les auteurs, mais sur lequel on n’a peut-être pas assez attiré l’attention ; nous voulons parler des rémissions.

Bayle a déjà rapporté plusieurs faits remarquables sous ce rapport, et on en trouve également des exemples dans les observations qu’il n’a pas rangées dans cette catégorie. D’autres auteurs ont aussi cité des cas de prétendues guérisons qui auraient été ensuite suivies de rechutes, ou qui même ne se seraient jamais démenties. Sans vouloir nier d’une manière absolue la possibilité d’une guérison réelle, alors que nous voyons un médecin aussi distingué que M. Ferrus en citer un exemple constaté pendant vingt-cinq ans, nous pensons que, dans la plupart des cas de ce genre, on a confondu la guérison avec les rémissions, plus fréquentes dans cette maladie qu’on n’est généralement disposé à le croire. Dans le service de mon père, à la Salpêtrière, j’ai vu plusieurs fois ces suspensions de la maladie, ou du moins des rémissions très notables, survenir à la suite de l’application du cautère actuel à la nuque ; malheureusement, au bout d’un temps plus ou moins long, il se produisait chez ces malades une rechute, après laquelle la maladie reprenait sa marche habituelle. M. Baillarger[1] a signalé également la disparition assez fréquente des phénomènes du délire dans le cours de cette affection ; mais il a soutenu que les symptômes paralytiques, et en particulier l’embarras de la parole, quoique très diminués, ne cessaient pas d’exister pendant cette suspension des phénomènes du délire, et témoignaient par leur présence de la persistance de la maladie.

Quant à nous, nous avons observé un certain nombre d’exemples de ce genre ; nous en avons vu un entre autres excessivement curieux, puisque la rémission a duré un an et demi ; nous citons ce fait à la fin de notre travail.

M. le Dr Coindet, de Genève, nous a rapporté également le fait très intéressant d’un aliéné paralytique chez lequel la maladie,

  1. Baillarger, Leçons cliniques, Ann. médico-psych. T. VIII, 1846.