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tances que l’on a pu croire quelquefois à l’invasion subite de la maladie, alors qu’une étude plus attentive des antécédents eût permis de retrouver, soit les perversions dans le caractère et dans les actes que nous venons de signaler, soit même l’existence antérieure d’un stade mélancolique très court, ayant précédé de quelque temps cette période prodromique d’activité.

Tels sont, en abrégé, les phénomènes variés que l’on constate ordinairement dans les antécédents des paralytiques, lorsqu’ils entrent dans les asiles d’aliénés. L’époque de cette admission est évidemment très variable, et ne peut servir de base à une distinction scientifique de période. Comme on n’observe en général convenablement ces malades, au double point de vue des phénomènes physiques et des phénomènes psychiques, qu’à partir de leur entrée dans les établissements, on a l’habitude de ranger parmi les prodromes les phénomènes que nous venons d’énumérer ; ils mériteraient plutôt le nom de première période, puisqu’ils sont déjà réellement des symptômes de la maladie, et qu’ils peuvent du reste avoir une assez longue durée.

Après l’explosion manifeste du délire, les aliénés paralytiques, à la première période, peuvent se présenter à l’observation sous trois formes principales, que certains auteurs, Bayle entre autres, ont considérées comme des périodes successives de la maladie, et dans lesquelles d’autres ont vu un argument puissant contre l’admission d’une marche déterminée de cette affection : ce sont les formes dites de monomanie, de manie et de démence. Il n’est pas exact de dire, avec Bayle, que chez les paralytiques on voit d’abord survenir la monomanie, puis la manie et enfin la démence ; mais il n’est pas exact non plus d’affirmer, avec d’autres médecins, que tout soit irrégulier et individuel dans l’apparition de ces diverses manifestations délirantes, et qu’il soit impossible de tracer une marche type de cette maladie. Il est certain que chez quelques paralytiques, il y a prédominance de l’état de délire partiel ; chez d’autres, de l’état d’agitation maniaque, et chez d’autres enfin, dès le début, de l’état de démence ; mais ce ne sont là, à nos yeux, que des différences extérieures dans le degré du calme ou de l’agitation : le fond de l’état mental reste toujours à peu près le même au milieu de cette diversité de manifestations. D’ailleurs, s’il est un