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effet, qu’en se livrant à des enquêtes sérieuses relativement aux antécédents des aliénés paralytiques, on découvre très souvent, dès le début de la maladie, l’existence de phénomènes physiques contemporains du délire, ou ayant suivi de près l’apparition des phénomènes intellectuels et moraux, qui seuls ont frappé l’attention : il serait donc inexact de dire que les phénomènes du délire précèdent presque toujours de longtemps les premières manifestations de la paralysie ; mais M. Baillarger nous paraît avoir eu le tort de confondre la simultanéité d’apparition des deux ordres de phénomènes avec l’antériorité des phénomènes paralytiques. S’il est vrai qu’un certain nombre de malades présentent, pendant un temps plus ou moins long, des phénomènes de paralysie sans délire, et plus tard, offrent tous les symptômes caractéristiques de la folie paralytique et même le délire des grandeurs (nous en avons nous-même observé un exemple très remarquable, que nous citons à la fin de ce travail), dans le plus grand nombre des cas, les deux ordres de phénomènes marchent de front dans leur évolution. De plus, s’il est des faits où la paralysie se produit avant le délire, il en est d’autres, comme on peut s’en convaincre dans les grands asiles d’aliénés, dans lesquels le délire caractéristique, sous la forme maniaque ou monomaniaque, précède l’apparition des premiers indices de la paralysie. En résumé, nous pensons que les symptômes de délire et de paralysie caractérisent au même titre l’un que l’autre la folie paralytique, et qu’ils apparaissent en général tous les deux, dès le début, à des degrés très divers il est vrai. Dans les cas où le délire est évident, il est rare qu’un médecin exercé n’aperçoive pas quelques traces de tremblement ou d’embarras de la parole ; dans ceux au contraire où les phénomènes paralytiques sont plus saillants, on constate presque toujours soit des modifications considérables dans le caractère, soit un affaiblissement manifeste de l’intelligence et de la mémoire. Telle est, selon nous, la règle générale ; néanmoins il est des cas exceptionnels où la paralysie existe pendant assez longtemps, sans altération de l’intelligence, et il en est d’autres aussi dans lesquels le délire caractéristique peut précéder d’assez longtemps les premières manifestations de la paralysie.

Après l’examen de cette question préliminaire, abordons la description de la marche de l’affection. Pour tenir compte des différences