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principal, tandis que le délire, auquel on avait jusque-là accordé la prééminence, n’était qu’un phénomène secondaire et accessoire. Une nouvelle phase commença alors dans l’histoire de cette maladie, et c’est alors aussi que M. Requin proposa le premier, en 1846, le nom de paralysie générale progressive, pour remplacer celui de paralysie générale des aliénés. Cette dénomination, en effet, ne semblait plus convenir, s’il était démontré que cette paralysie pouvait exister chez des individus non aliénés, et que, dans les cas mêmes où l’aliénation survenait ultérieurement, la première période de la maladie consistait principalement dans des phénomènes paralytiques.

Cependant, en même temps que surgissait cette opinion nouvelle sur la nature de cette affection, il s’en produisait parallèlement une autre, basée, comme la précédente, sur les faits nouvellement observés, mais interprétés d’une manière différente. Les partisans de cette opinion, au lieu de confondre en une seule maladie les faits constatés dans les hôpitaux ordinaires et les faits observés dans les asiles d’aliénés, concluaient à l’existence de deux espèces de paralysies générales, l’une sans aliénation, et l’autre avec aliénation. Cette manière de voir, principalement soutenue par MM. Sandras, Brierre de Boismont, et Duchenne de Boulogne, est encore peu précisée. Ces auteurs, en effet, n’ont eu à citer qu’un très petit nombre d’exemples de cette maladie nouvelle, et n’ont pas pu établir de caractères distinctifs, autres que la présence ou l’absence du délire, qui permettraient de la distinguer, dans ses symptômes et dans sa marche, de la paralysie des aliénés.

En résumé, dans l’état actuel de la science, il existe quatre opinions principales relativement à la paralysie générale :

L’une, la plus ancienne de toutes, admise par Delaye, Calmeil, Georget, Esquirol, et la plupart de ses élèves, consiste à considérer cette maladie comme une simple complication ou même comme une terminaison de toutes les espèces d’aliénation mentale.

L’autre, soutenue, avec plus ou moins de rigueur, par Bayle, Parchappe, Ducheck de Prague[1], etc., consiste à l’envisager comme une forme distincte et spéciale de folie, caractérisée tout à

  1. Ducheck, Vierteljahrsschrift für praktische Heilkunde ; Prag, t. VIII, Jahrgang 1851, 1er numéro.